Les conditions de Washington pour investir dans le secteur minier en RDC

Coordonnateur spécial du président américain en charge des Affaires énergétiques internationales, Amos Hochstein vient de boucler sa mission de deux jours en République démocratique du Congo. Du 12 au 13 septembre en effet,  l’émissaire du président américain Joe Biden s’est  entretenu avec le président congolais, Félix Antoine Tshisekedi avec qui il a échangé particulièrement sur les enjeux des mines du pays et sur les conditions requises pour attirer les investisseurs américains.

Face à la presse hier à Kinshasa, Amos Hochstein a insisté sur l’intérêt qu’accorde Washington à la RDC. « Nous avons, dit-il, une large gamme d’intérêts au Congo. C’est pourquoi les Etats-Unis d’Amérique tiennent à renforcer leurs relations avec la RDC« .  

« L’objet de ma visite, c’est essentiellement dans le développement du secteur des mines. Aussi sur le potentiel d’investissement dans ce secteur, en examinant les conditions existante« , a-t-il précisé.

L’enjeu congolais

« La RDC est l’un des pays les plus importants au monde, parce qu’elle contribue à la transition énergétique, à mesure que nous passerons du carburant fossile pour parvenir à une énergie plus propre« , a fait remarquer l’émissaire du président Joe Biden.

« Le monde entier aura besoin de minerais, des ressources naturelles… dans l’ensemble qui sont nécessaires à cette transformation. Et je ne pense pas qu’il y ait un pays outre que la RDC qui puisse apporter autant au monde« , a souligné le Coordonnateur spécial du président américain en charge des Affaires énergétiques internationales.

Non à la corruption et au travail inhumain

« Nous voulons donc de l’énergie, mais aussi nous assurer des conditions dans lesquelles travaillent ceux qui contribuent à cette énergie (que nous voulons) plus propre. Pour ce faire, nous avons une bonne compréhension de ce que veut dire énergie plus propre. C’est-à-dire pas de corruption mais aussi des (garanties) de conditions de travail de ceux qui œuvrent dans le secteur des minerais« , a précisé Amos Hochstein.  

« C’est donc de cela que nous avons discuté ces deux derniers jours avec les autorités congolaises. Je garde mon espoir et j’ai hâte de revenir ici lors d’un prochain voyage« , a lâché, tout souriant, l’hôte américain.

Sur les traces de Blinken

La mission d’Amos Hochstein à Kinshasa intervient juste un mois après la visite d’un autre émissaire de Joe Biden. Anthony J. Blinken, le secrétaire d’État américain, avait séjourné dans la capitale congolaise du 9 au 10 août dernier.

Sa visite, de deux jours également, lui avait permis d’échanger avec ses hôtes sur plusieurs domaines et particulièrement sur le secteur d’investissement. L’un de deux points au cœur de la mission d’Amos Hochstein.

Anthony J. Blinken s’était aussi focalisé sur « la lutte contre la corruption, l’appui au commerce et aux investissements, les actions visant à faire face aux changements climatiques, l’accroissement de la résilience agricole… ». L’objectif était également d’appuyer « les efforts africains régionaux pour promouvoir la paix dans l’est de la RDC et l’ensemble de la région des Grands Lacs ».

La prudence élastique d’investisseurs américains

Au regard des objectifs visés par les deux missions, on comprend, dès lors, l’importance que l’administration Biden attache à l’investissement en RDC, et particulièrement au secteur minier. Précisément dans un contexte où se bousculent désormais plusieurs puissances économiques en quête de minerais stratégiques. 

Selon nombre d’analystes, Washington conditionne l’arrivée de ses investisseurs au respect d’un certain nombre de critères démocratiques, censés garantir la transparence dans un environnement où d’autres expatriés ont jugé mieux de se lancer sans trop de préalables. Et pour les autorités congolaises qui ont besoin des capitaux frais pour démarrer le développement d’un pays longtemps appauvri et asphyxié, elles semblent plus pencher vers le réalisme que vers la prudence élastique d’investisseurs américains, notent ses observateurs.  

C’est d’ailleurs cette rouée vers les minerais qui est devenue un enjeu dans la région, d’autant qu’elle suscite de nombreux conflits armés. Ce qui a poussé Anthony J. Blinken à demander aux pays voisins de la RDC de cesser de soutenir des groupes armés comme le M23. Yves KALIKAT

Washington cherche à se positionner sur l’exploitation du cobalt et du lithium en RDC

Les États-Unis considèrent la RDC comme un pays stratégique dans l’accélération de la transition énergétique. Et la crise entre la Russie et l’Ukraine démontre que les pays gagneraient à diversifier leurs sources d’approvisionnement pour éviter, selon Amos Hochstein, « que l’économie mondiale soit prise en otage par un seul pays producteur« . La situation actuelle témoigne, ajoute-t-il, de l’urgence d’accélérer la transition énergétique.

« Dans la mesure où nous accélérons la transition énergétique, au lieu d’utiliser l’essence ou le gasoil, nous allons utiliser les batteries électriques. Ainsi, on a besoin du cobalt, du nickel et du lithium. Le territoire congolais regorge de ces minerais. La RDC peut faire partie de la solution pour le monde. »

Cependant, pour attirer des investisseurs américains dans ce domaine, les États-Unis posent des préalables. « Nous avons été très encouragés par le président Félix Tshisekedi au sujet de l’intérêt qu’il manifeste par rapport à la lutte contre la corruption. Nous voulons le voir en action. Nous souhaitons que ces paroles se traduisent en actions. Dans le secteur des mines, nous voulons voir une réduction significative de la corruption. Si ces progrès se réalisent, vous verrez les genres d’investissements que nous souhaitons voir en RDC ».

Selon plusieurs observateurs, ces recommandations visent les entreprises chinoises majoritaires dans le secteur minier en RDC. L’empire du milieu est d’ailleurs l’une des principales destinations des produits miniers congolais.

Allié des États-Unis, bien qu’adepte du multilatéralisme économique, Félix Tshisekedi avait appelé fin 2020 à un audit des partenariats miniers avec des entreprises chinoises. Une démarche soutenue par les États-Unis. Patient Ligodi (RFI)

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