Lors d’une conférence à l’Université de Kinshasa : Le physicien Max Seke appelle à prendre en compte les risques chimiques dans les constructions

Le physicien Max Seke Vangu a lancé un appel pressant à la population pour qu’elle prenne en compte les risques chimiques dans la construction. C’était lors d’une conférence organise le 29 novembre à l’Université de Kinshasa.

Dans son exposé intitulé « Sciences et technologies pour un ciment innovant« , il a souligné l’importance d’adopter des pratiques de construction sûres et respectueuses de l’environnement.

Cette intervention faisait partie de la conférence « Jeunesse & construction« , organisée pour sensibiliser les participants à l’impact des choix technologiques et des matériaux dans le secteur de la construction.

Un avenir durable et innovant

Scientifique reconnu et détenteur de la médaille d’or des Mérites Arts, Sciences et Lettres (ASL), Max Seke a mis l’accent sur le rôle fondamental de la science et de la technologie dans le développement de solutions durables. « Pour un avenir durable, il est essentiel d’adopter des pratiques de construction qui prennent en compte les risques chimiques tout en continuant à innover« , a-t-il déclaré.

Le conférencier a souligné que l’innovation dans l’industrie du ciment ne se limite pas à l’amélioration des performances techniques, mais inclut également la réduction de l’impact environnemental et la réponse à des besoins spécifiques liés à la sécurité et à la durabilité. Il a appelé à une sélection rigoureuse des matériaux de construction et des procédés respectueux de l’environnement, tout en insistant sur l’importance de prendre des mesures de sécurité adéquates pour prévenir les risques chimiques.

Les dangers de l’amiante et de la silice respirable

Le conférencier a particulièrement mis en lumière deux risques chimiques majeurs dans la construction : l’amiante et la silice respirable. Ces substances, présentes dans certains matériaux de construction, sont responsables de maladies graves telles que l’amiantose et la silicose.

L’amiante, un groupe de minéraux naturels fibreux, a été largement utilisé dans la construction en raison de ses propriétés ignifuges et de son faible coût. Cependant, ces fibres microscopiques, lorsqu’elles sont inhalées, peuvent pénétrer dans les poumons et provoquer des maladies graves.

«  La présence de l’amiante dans nos bâtiments est un héritage colonial, mais elle constitue un danger réel pour la santé, comme l’a montré le procès de Turin sur l’amiantose « , a précisé Max Seke Vangu.

Le procès de Turin, en Italie, a marqué un tournant historique en 2009, lorsqu’un tribunal a condamné l’entreprise italienne Eternit pour l’empoisonnement de milliers de travailleurs et de résidents exposés à l’amiante. Ce procès, qui a révélé les effets dévastateurs de l’amiante, a conduit à une prise de conscience mondiale des risques liés à cette substance. Il a été l’un des premiers à établir un lien direct entre l’exposition à l’amiante et des maladies graves, telles que l’amiantose, un cancer du poumon, et la mésothéliome, un cancer rare lié à l’inhalation de fibres d’amiante. Cette affaire a bouleversé l’industrie de la construction et accéléré les efforts pour interdire et éliminer l’amiante dans de nombreux pays européens.

DES POLLUEURS SILENCIEUX

La condamnation de l’entreprise Eternit a fait office de déclencheur pour la vague de désamiantage qui s’est intensifiée à partir des années 2000 en Europe. En Italie, la loi interdisant l’utilisation de l’amiante a été adoptée en 1992, suivie par de nombreux autres pays, dont la France en 1997, l’Allemagne en 1993, et le Royaume-Uni en 1999. Ces mesures ont imposé des programmes de désamiantage dans les bâtiments publics et privés, tout en prévoyant des compensations financières pour les victimes de l’amiante. Cependant, malgré ces interdictions, des milliers de personnes continuent de souffrir des conséquences de cette exposition, et des efforts de nettoyage et de décontamination sont encore en cours dans de nombreuses régions européennes.

En plus de l’amiante, le physicien a attiré l’attention sur la silice respirable, qui peut également avoir des effets dévastateurs sur la santé. La silice cristalline, présente dans des matériaux comme le béton, le ciment ou le sable, peut causer la silicose, une maladie pulmonaire chronique. «  Lorsque la silice respirable est inhalée sur de longues périodes, elle provoque l’accumulation de poussières dans les poumons, ce qui peut engendrer la formation de nodules et entraîner une scarring progressive des tissus pulmonaires« , a-t-il expliqué. Cette maladie, bien que silencieuse au début, peut être débilitante et parfois mortelle à mesure qu’elle progresse.

Une vision globale de la gestion des risques chimiques

L’intervention de Max Seke Vangu s’inscrit dans une réflexion plus large sur la gestion des risques liés aux substances chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires (CBRN). En tant qu’expert du Centre d’Excellence CBRN en République Démocratique du Congo (COE-CBRN/RDC), il a rappelé que son institution est chargée de coordonner les actions de prévention et d’atténuation des risques liés à ces matières dangereuses.

Le COE-CBRN/RDC joue un rôle central dans la gestion des risques associés à la prolifération de ces substances, en particulier dans le cadre des pratiques industrielles et de la construction. L’institution œuvre à la protection de la santé publique et de l’environnement en sensibilisant les acteurs du secteur à l’importance d’adopter des technologies et matériaux sûrs.

Vers une prise de conscience collective

Cette conférence a permis d’attirer l’attention sur la nécessité d’une meilleure réglementation et d’une vigilance accrue dans le secteur de la construction. En sensibilisant les acteurs du secteur à ces risques, Max Seke Vangu appelle à une révolution des pratiques de construction en RDC, afin de garantir des constructions plus sûres et respectueuses de la santé des citoyens.

La mise en place de normes plus strictes, tant pour les matériaux que pour les procédés utilisés, est essentielle pour prévenir les dangers associés à l’amiante, à la silice respirable et à d’autres substances potentiellement nuisibles.

Ainsi, l’exposé du chercheur a souligné l’urgence de changer les paradigmes de la construction, non seulement en matière d’innovation technologique, mais aussi en termes de responsabilité environnementale et sanitaire.

Aimé TUTI

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