Dernière guitare de la Rumba congolaise : Papa Noël Nedule s’est éteint à l’âge de 83 ans

Dans la Rumba congolaise, il a fait la pluie et le beau temps sous le sobriquet de « Papa Noël ».  Antoine Nedule Montswet – C’est de lui qu’il s’agit -,  s’est éteint hier lundi 11 novembre en France à l’âge de 83 ans. Ce virtuose de la guitare, qui a marqué la scène musicale congolaise pendant des  décennies,  était l’un des derniers témoins et acteurs de cette période faste qui a vu naître et s’épanouir ce genre musical, désormais inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.

Il a vu le jour sous l’ex-Congo Belge. Mais  Papa Noël n’est pas né le jour conventionnel de la naissance du Christ. Son surnom, il le doit plutôt à son menthor, Léon Bukasa, qui a dû renverser son rpénom pour se faire appeler « Noël ».

C’est très jeune qu’Antoine s’initie à la guitare en écoutant Daniel Lubelo,  un aîné du quartier, jouer des airs de rumba. Cette passion le pousse à demander à sa mère sa première guitare, instrument qui deviendra l’extension de son âme.

Surnommé également « Petit Django  » sans doute en référence au guitariste français de jazz Django Reinhardt, Papa Noël était un « Mununu« , originaire de Bolobo du côté de sa mère. Cette dernière l’a élevé seule en l’absence de son père, un Congolais de Brazzaville.             Dès l’âge de 14 ans, il rejoint Léon Bukasa et s’intègre rapidement à l’univers musical congolais où il est reconnu pour son style inimitable, proche des maîtres Tino Baroza et Nico Kasanda.

 » Ya Nono  » , comme l’aimait bien l’appelait Carlyto Lassa, a traversé les deux plus grandes écoles de la rumba congolaise, l’African Jazz dirigé par Grand Kallé Jeff, et l’OK Jazz de Franco Luambo Makiadi.

Dans les années 50 et 60, il brille déjà dans l’African Jazz où son talent est révélé à travers des morceaux mémorables comme « Bakule Bakule », un classique chanté par Philippe Lando Rossignol.

Puis, au début des années 1980, il rejoint Franco et l’OK Jazz, un passage qui marque l’apogée de sa carrière. C’est dans cet ensemble mythique qu’il révèle toute l’étendue de son génie musical. Des titres comme « Bon Samaritain », interprété par Carlyto Lassa, sorti quelques années plus tard, incarnent le sommet de son art.

Son parcours musical est jalonné de collaborations prestigieuses. Des Bantous de la capitale à l’African Jazz, en passant par son propre orchestre Bamboula qui brilla au Festival Panafricain d’Alger en 1967, Papa Noël a su imposer son style unique.

« Maître incontesté de la guitare« , il a su tisser des ponts entre l’Afrique et Cuba, comme en témoigne son œuvre « Café Noir« , où il collabore avec le sonero cubain Cotó. Cette fusion musicale rappelle les liens historiques profonds entre le Congo et Cuba, unis par l’histoire de l’esclavage et la musique qui en est née.

En janvier 2024, Papa Noël fait une apparition émouvante dans une vidéo devenue virale. Hospitalisé en France et sans domicile fixe, il lance un appel déchirant aux autorités congolaises.  » J’ai fait 60 ans de travail au Congo Brazzaville et au Congo Léopoldville… aidez-moi, je suis dans la souffrance et je n’ai personne pour m’aider. « 

Sa maison de Kinshasa, vendue par ses enfants, l’a laissé dans une situation d’abandon, malgré une carrière consacrée à élever et enrichir la culture congolaise.

Papa Noël nous laisse une discographie riche et des morceaux éternels comme « Tangawisi » et « Bel ami ». La guitare de Papa Noël s’est tue, mais ses mélodies résonnent encore dans le cœur des amoureux de la rumba.

Christian-Timothée MAMPUYA

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