Lors d’une conférence de presse tenue à Goma le mardi 26 novembre marquant la fin de son séjour en République démocratique du Congo, Élisabeth Ann Bechdol, directrice générale adjointe de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a lancé un appel pressant pour mobiliser plus de 350 millions de dollars américains en réponse aux besoins urgents des agriculteurs congolais.
Cette initiative vise à alléger la crise humanitaire qui frappe notamment l’Est du pays, où de nombreux citoyens souffrent des conséquences des conflits armés, comme celui perpétré par le M23.
La conférence s’est tenue le 26 novembre 2024 à Goma, après une semaine de visites sur le terrain, notamment à Kinshasa, à Goma et à Bukavu.
Élisabeth Ann Bechdol a eu l’occasion de rencontrer des déplacés internes dans des sites près de Goma, où elle a été témoin des conditions précaires vécues par des milliers de Congolais.
Elle a souligné l’importance de réorienter l’aide humanitaire vers des solutions agricoles durables, qui sont plus économiques que les aides stratégiques limitées basées uniquement sur des secours d’urgence.
« Les interventions agricoles que nous proposons sont plus durables et économiques par rapport aux transferts d’aide directe qui, bien que nécessaires, ne sont pas une solution à long terme« , a-t-elle déclaré. Elle a également noté que les 350 millions de dollars sollicités pour l’année prochaine ne sont qu’une fraction des milliards déjà investis dans l’aide humanitaire, soulignant l’urgence de transformer cette aide vers le secteur agricole.
Bechdol a également plaidé pour le rétablissement de la paix dans l’Est de la RDC, car celle-ci est essentielle pour permettre aux habitants de reprendre leurs activités, notamment celles liées à l’agriculture et à l’élevage.
Elle a averti que, dans de nombreuses régions du monde, les conflits demeurent la première cause de l’insécurité alimentaire. Elle a, par ailleurs, exprimé la nécessité d’une coopération renforcée dans le cadre des Nations Unies pour restaurer la paix.
La crise humanitaire en RDC aggrave encore la situation déjà critique dans cette région. Selon les rapports, le nombre de personnes déplacées dans le Nord-Kivu a explosé, passant de 1,8 million en 2021 à plus de 2,7 millions en 2024.
Le coordonnateur humanitaire en RDC, Bruno Lemarquis, a indiqué que la baisse de financements complique encore plus la situation, appelant les acteurs humanitaires à envisager des solutions à long terme pour les déplacés espérant retourner chez eux.
« L’assistance humanitaire, bien qu’indispensable, ne peut pas être la solution durable aux crises. Il est crucial d’adopter une vision orientée vers la résilience et la reconstruction« , a affirmé Lemarquis après des échanges avec la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, qui a récemment effectué une mission d’évaluation des répercussions de l’état de siège dans le Nord-Kivu et l’Ituri.
Ces préoccupations sont d’autant plus pressantes à la lumière des affrontements persistants entre le M23, le Rwanda et les forces armées congolaises (FARDC) dans des zones comme Masisi et Rutshuru.
Des rapports alarmants font état d’un renforcement des troupes et des munitions du M23, qui continue d’opérer des exactions contre les civils, tout en sapant les efforts de paix engagés par les autorités de Kinshasa et Kigali.
La situation demeure critique pour les millions de Congolais touchés par la guerre. Alors que les appels au secours se multiplient, le besoin d’une réponse globale et intégrée pour promouvoir la paix et la sécurité alimentaire en RDC n’a jamais été aussi urgent.
Pascal NDUYIRI