Brouillages du GPS des Vols en RDC : L’expert Eva Roger Kalonji conseille au gouvernement congolais d’enclencher un plan d’urgence et de déterminer la cause

La République démocratique du Congo (RDC), partie à la Convention relative à l’aviation civile internationale de 1944, a, dernièrement, saisi les instances régionales de l’Organisation de l’aviation civile internationale (Oaci) demandant de sanctioner le Rwanda pour les brouillages du GPS de ses vols. Dans une interview accordée à Forum des As, Evariste-Roger Kalonji, expert en aviation civile parle des sanctions qu’encoure le Rwanda. En sa qualité de chercheur dans le domaine de la navigation aérienne pour avoir travaillé sur l’implantation d’un système d’atterrissage aux hyperfréquences, il conseille au Gouvernement d’enclencher un plan d’urgence et de déterminer la cause source.

Forum des As: Le gouvernement congolais a condamné fermement le Rwanda pour les brouillages du GPS de ses vols, les qualifiant de violations graves du droit international comparables à l’usage d’armes de guerre contre des cibles civiles. Qu’en dites-vous?

Eva Roger Kalonji: Premièrement, nous rappelons que le Rwanda a adhéré à la convention de Chicago, donc c’est un Etat contractant et membre de l’Oaci. Plus encore, depuis janvier 2024, il est membre de l’Association pour la sécurité de la navigation aérienne (Asecna), structure qui gère l’installation des équipements nécessaires à la fourniture de services de la navigation aérienne. Le Rwanda a signé avec l’Asecna l’accord de siège et celui de transfert de gestion. Et il représente ainsi la Région africaine des grands lacs et le Madagascar…

La RDC a saisi les instances régionales de l’Organisation de l’aviation civile internationale (Oaci) pour exiger des sanctions appropriées. Certaines langues  considèrent l’action du Congo de jérémiades. Cette démarche est-elle efficace?

De ce fait, il ne peut pas intentionnellement créer une menace au transport aérien international des civils et à notre humble avis, il ne s’agit là que des actes collatéraux à leurs activités militaires qui ne visaient que des drones. Nous ne pensons pas que le Rwanda chercherait à violer ces conventions en s’attaquant à l’aviation civile et la démarche de la RDC est plus efficace parce qu’elle désigne le Rwanda comme responsable de tout incident ou accident qui adviendrait dans cette zone. Rien à voir en cela le fait de pleurnicher ou faire des jérémiades. C’est plutôt un front ouvert dont elle prend le dessus car, en cas d’une menace à la sécurité ou sûreté d’un vol, tout le monde est en alerte pour écarter cette dernière… L’illustration la plus simple est de juste crier «j’ai vu la bombe» dans un aéroport pour voir tout s’arrêter et un plan d’urgence activé.

Et si tel est le cas, quelles sanctions le Rwanda encoure-t-il ?

Les sanctions sont prévues dans la Convention de Montréal du 23 septembre 1971(Convention pour la répression des actes d’intervention illicite contre la sécurité de l’aviation civile internationale). Cette dernière détermine les responsabilités dans ce genre d’infractions liées aux actes d’intervention illicite. Déjà l’alinéa d. du premier article stipule que «commet une infraction pénale toute personne qui détruit ou endommage les services de navigation aérienne ou en perturbe le fonctionnement de nature à compromettre la sécurité d’aéronefs en vol».

L’Oaci et le Conseil de sécurité des Nations Unies ont un partenariat pour combattre les auteurs de ces actes. C’est d’ailleurs, ce qui justifie le fait que si rapidement les USA ont condamné les attaques de brouillage du GPS par le Rwanda.

Pensez-vous qu’il y a moyen que les pilotes évitent les catastrophes dues à ces interférences sur le GPS ?

Effectivement le GPS n’est pas l’unique moyen d’aide à la navigation aérienne. Ils ont le VOR/VHF omnidirectional Range ou Radiophare omnidirectionnelle VHF qui est une aide à la navigation permettant de connaitre sa route magnétique en direction ou en éloignement d’un aéroport). Ils ont également le Distance Measurement Equipement (DME) qui permet de connaitre sa distance oblique entre l’avion et la station (aéroport). Pour les endroits sans VOR/DME, des parades sur le brouillage du GPS c’est entre autre l’utilisation d’antennes directionnelles et l’analyse détaillée des signaux pour repérer d’éventuelles incohérences ou encore des centrales inertielles de navigation.

En conclusion, si en tant que qualiticien, il vous était demandé de conseiller le Gouvernement, que diriez-vous ?

En matière de qualité, l’anticipation étant le maître-mot en aviation, un incident majeur à un niveau élevé de risque, d’où un plan d’urgence doit être enclenché et la cause source déterminée sans délai.

En attendant la réaction de l’Oaci, la Défense doit lancer une recherche afin de détecter et localiser cette source de brouillage du GPS et l’anéantir pendant que le ministère des Transports, par le biais de l’AAC, devrait assurer du renforcement du VOR/DME dans la zone et encourager les navigants à collaborer dans la remontée d’information.

Propos recueillis par Dina BUHAKE Tshionza

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