La dette publique de la République Démocratique du Congo a franchi la barre de 10 milliards de dollars à fin 2023, selon le dernier rapport de la Direction Générale de la Dette Publique (DGDP). Un résultat qui fait couler encre et salive.
«L’endettement n’est pas mauvais en soi, car l’État peut recourir à cela pour pouvoir lancer des projets porteurs de croissance solide, durable et en même temps lancer le développement du pays en créant les conditions de richesse», explique le député national et spécialiste des questions économiques Éric Tshikuma.
Il intervenait, ce jeudi 11 avril 2024, au cours de l’émission Dialogue Entre Congolais sur les ondes de la Radio Okapi. D’après cet élu national, un Etat ne peut pas s’empêcher de contracter une dette.
«Lorsqu’on regarde les cinq pays les plus riches, ce sont les pays les plus endettés du monde. Seulement ces dettes servent à développer leur pays. Nous travaillons avec des partenaires multilatéraux, ces bailleurs de fonds ne vont pas tolérer que les conditions de mise en œuvre de projets ne soient pas respectées, sinon la RDC serait mal réputée et ne bénéficierait pas d’un autre endettement », indique-t-il.
Parmi les projets porteurs de croissance qui valent la peine d’un endettement, le député national Eric Tshikuma cite les projets d’infrastructures réalisés à travers le pays.
«Le projet de développement local de 145 Territoires touche à des secteurs socio-économiques à partir de la base. Dans trois ans, on va voir ces projets porter des fruits quand bien même aujourd’hui les gens ne le sentent pas encore. Il y aura des effets qui se feront ressentir», fait-il savoir.
Au-delà du PDL-145 T, Eric Tshikuma estime que le service de la dette contribue également à financer les travaux de construction ou de réhabilitation des routes d’intérêt national.
«Une fois ces routes achevées, elles permettront à ce que la RDC puisse s’engager vers le développement. C’est le cas de la route Kisangani-Béni; Kananga-Mbuji-Mayi; Mbuji-Mayi-Bukavu; Bukavu-Goma. Des routes nationales vont être rahabilitees pour permettre la fluidité des opérations économiques, ce qui facilitera le commerce et la circulation de gens, car ces routes vont contribuer en termes d’infrastructures qui sont créatrices de croissance. Au finish, le tissu économique sera solidifié», soutient-il.
Le secteur de l’éducation, avec la gratuité de l’enseignement primaire n’est pas en reste avec notamment la réhabilitation et la construction de plusieurs écoles.
Eric Tshikuma insiste sur le fait que l’Etat ne contracte pas des dettes pour payer le salaire des enseignants qui est financé par le Trésor public. Cela rentre dans le cadre des charges régaliennes du Gouvernement qui sont supportés par le budget de l’État, affirme-t-il. Mais, l’argent qui vient de l’endettement finance, par exemple, la construction des écoles.
Un autre secteur bénéficiaire de la dette publique, c’est celui de la Santé.
Pour le député national Éric Tshikuma, le secteur de la Santé est inclu dans le projet de développement local de 145-Territoires. Il y a des centres médicaux qui sont construits ou réhabilités.
Au cours de cette émission, le député national Eric Tshikuma débattait avec Lem’s Kamwanya, analyste économique, et Florimond Muteba, Président du Conseil d’administration de l’Observatoire de la dépense publique.
Pour sa part, Florimond Muteba approuve que la dette n’est pas mauvaise en soi, mais seulement il doute de la qualité de ces investissements qui ne conduiront pas au retour sur investissements, selon lui. «On doit savoir comment s’endetter, un endettement de qualité qui va de la programmation jusqu’à la mise en œuvre du projet», déclare-t-il.
Il note aussi qu’il y a des dettes qui ne sont pas porteuses de croissance. Le cas du programme de 100 jours, regrette-t-il. Florimond Muteba déplore, par ailleurs, le dysfonctionnement du processus de planification, programmation, évaluation et suivi en République Démoctatique du Congo.
De son côté, Lem’s Kamwanya attire l’attention sur le fait qu’une dette contractée génère des intérêts à payer. «On doit se poser la question sur la qualité des dépenses publiques qui sont financées par cette dette publique. Mais, si cet argent est détourné ou dilapidé suite à la corruption, l’argent qui a été endetté n’arrive pas à financer les projets pour lesquels il a été contracté, ça soulève un problème», souligne cet analyste économique.
En guise de solutions, Lem’s Kamwanya préconise d’accentuer la lutte contre la corruption; de veiller sur la qualité de la dépense publique; et d’éviter les effets néfastes du service de la dette. Zoom Eco