« Dollar ekita », en tête du hit-parade

Pas besoin d’un sondage pour désigner la chanson la plus en vogue lors des 9èmes  jeux de la francophonie. Ce n’est ni un opus du très talentueux Ferré Gola ni une oeuvre du virtuose Fally Ipupa, mais  » dollar ekita « , chanson  collective entonnée et chantée a capela  en chœur,  par cœur et avec cœur par des dizaines de milliers de spectateurs installés dans  les gradins du stade des Martyrs !

A l’heure où nombre de compositions  ne charrient plus grand-chose en termes de message,  » dollar ekita  » est un concentré de mille et une figures de style. Sans autre parchemin en exégèse que le fait de vivre en RDC, on comprend vite que cette  » chanson  » constitue une interpellation à très large spectre.

Au premier degré, elle interpelle trivialement  les dirigeants du pays présents au stade sur la dégringolade proverbiale du franc congolais face à la devise américaine. Au second degré  » Dollar ekita  » a à la fois tout  d’une métaphore et  d’une litote. 

La monnaie américaine renvoyant au pouvoir d’achat des gagne-petit   ou plus exactement  à ce qui en tient lieu. Pas besoin d’un dessin pour préciser  qu’il s’agit de l’écrasante majorité de la population rd congolaise.

 Cette chanson culte des 9èmes jeux comporte aussi sa part de litote en ce que  » Dollar ekita  » est une manière ramassée d’exposer la sempiternelle misère du peuple. Au lieu d’égrener le long chapelet de difficultés qui constituent l’écosystème du plus grand nombre, le génie kinois a eu utilement recours à un raccourci.  A savoir la litote, l’art d’articuler  peu de mots  pour exprimer  de grandes choses. En l’occurrence, la clameur publique du stade n’était pas très éloignée du très lapidaire  » le peuple souffre  » du Cardinal Ambongo à l’occasion de la visite du Pape François fin janvier et début février de l’année en cours. 

Il y a plus de deux millénaires,  les Romains réclamaient à César les jeux et le pain. Les Kinois savourent les jeux,  mais sans oublier le pain. Une grosse piqûre de rappel aux gouvernants par rapport à l’échelle de priorités dans un pays où les urgences se toisent et se font concurrence.

Si le divertissement est une priorité, il y a à l’évidence vu du Congolais lambda plus prioritaire que cette priorité-là. Pour n’avoir pas intégré la donne aussi triviale que basique, à savoir   » le ventre d’abord « , des régimes antérieurs ont perdu leur légitimité auprès des masses populaires. Pourtant, les pouvoirs  Mobutu et Kabila fils   pouvaient brandir aussi, tels des trophées, des hauts faits de prestige.  José NAWEJ

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