La trentaine révolue, 65 kg, 1,75 m, Niclette Makondele rêve de devenir une arbitre internationale. Svelte, athlétique, rien que son physique renseigne déjà qu’on a à faire à une sportive. Pas d’embonpoint, un corps exercé. Très jeune, elle embrasse le sport, notamment le basketball. Niclette Makondele découvre sa 2ème discipline sportive, la lutte, grâce à un entraineur de passage au centre de santé où elle prestait en tant que stagiaire technicienne de laboratoire bio-médical. Actuellement, elle évolue dans le monde sportif avec plusieurs casquettes. Elle est à la fois arbitre nationale à la fédération congolaise des luttes associées, arbitre nationale à la fédération nationale de Sambo et 4 ème entraineure de club des luttes Delta Force.
Après son diplôme d’Etat en Pédagogie générale, Niclette Makondele va poursuivre ses études supérieures à l’Institut supérieur des Sciences de santé/ Croix-Rouge à Kinshasa où elle va décrocher son diplôme de Graduat en Sciences de Laboratoire en 2011. Mais son amour pour le basket a commencé dès l’âge de 13 ans. A la fédération de lutte, elle est arbitre depuis 2014 et à la fédération de Sambo depuis 2022. Et enfin entraineure de club des luttes Delta Force depuis 2022.
Parfois les circonstances de la vie orientent les personnes à faire un métier qu’on n’a jamais rêvé. Niclette Makondele est passée du basket jusqu’aux luttes associées. Elle découvre cette discipline grâce à un patient qui s’était présenté au centre de santé qui l’emploie jusqu’à ce jour. Avec un œil sportif, ce dernier découvre en elle la carrure d’une sportive et lui propose d’ajouter au basket la lutte à son actif.
«Je passai mon stage de laboratoire dans un centre de santé privé de la place. Maître Jamal, qui est aujourd’hui parmi le maitre de mon club est venu se faire examiner. A première vue, il m’a dit que j’avais une forme physique d’une sportive. Je lui ai dit que je jouais au basket. Il m’a dit que je pouvais ajouter une 2ème discipline qu’est la lutte. Au départ, comme je ne la connaissais pas, j’ai émis de doute. Quand il est revenu dans les après-midi chercher les résultas, il m’a proposé d’aller avec lui à la maison communale de Ngiri-Ngiri pour assister à l’entrainement. La présence des filles m’avait motivé. Et surtout la façon dont les athlètes étaient encadrées m’a beaucoup intéressé. Et le lendemain, j’ai commencé mes entrainements», raconte Niclette Makondele.
Formation des arbitres
Niclette Makondele est devenue arbitre à l’issue d’une formation des arbitres à laquelle elle a terminée avec brio. «Pour la lutte, je n’ai pas eu vraiment le temps de combattre sur le tapis. J’ai fait seulement le championat de Kinsahsa où j’étais classée 3ème sur 4. Après, il ya eu le challenge Pamphil du Congo. Là, j’avais participé en tant qu’athlète. J’ai embrassé la lutte vers la fin 2013. C’est en 2014, après une formation des arbitres organisée à la fédération par Mado Ekene, alors présidente. Mes entraineurs m’ont poussé à suivre cette formation. Nous étions au nombre de 46 candidats et j’étais la seule femme. Parmi ceux qui ont distingués, nous étions 20 dont moi», raconte-telle.
Première prestation en tant qu’arbitre
Sa première prestation en tant qu’arbitre était pleine de questionnement. «Directement après la formation, on a organisé le championat de Kinshasa à Maïsha Parc. C’était ma première prestation sur le tapis. J’avais peur de monter sur le tapis. Je me demandais, comment vais-je arbitrer le combat des hommes, les combats des femmes ? Est-ce que je serai en mesure de le faire ? », explique-t-elle.
Rêve de devenir une arbitre internationale
C’est grâce aux encougements de ses entraineurs qu’elle a eu le courage d’aller de l’avant. Et avec le temps, elle a pu maîtriser les règlements.
«Je souhaite devenir arbitre internationale. Dans notre discipline, la lutte, nous n’avons aucun arbitre international. La fédération ne nous envoit pas en stage sous prétexte que nous n’avons pas de niveau. Or, pour acquérir le niveau supérieur, il faut aller en stage de formation afin d’avoir le même niveau que d’autres arbitres. Les Brazzavillois ont des internationaux. Cela grâce à l’amour qu’a leur président de la fédération de développer cette discipline dans son pays», déplore-t-elle.
Message au gouvernement
La mort dans l’âme, Niclette Makondele sollicite l’appui du Gouvernement pour des stages de perfectionnement.
«Si le Gouvernement peux mettre à notre disposition de moyens appropriés pour nous permettre de nous envoyer en stage de perfectionnement. Mon souci est que mon nom figure sur la liste des arbitres internationaux. J’ai des atouts et de l’expérience», rassure cette femme déterminante.
Bien des prestations à son actif
«Ma première prestation date de l’époque du ministre Denis Kambayi. J’avais arbitré le combat qu’il avait organisé entre la RDC et l’Angola. En 2017, j’avais également arbitré le combat organisé la zone 4 à Kinshasa organisé par le président Léon Mvila qui est maintenant le président de Sambo. Je suis allée à Brazzaville arbitrer un combat entre la RDC et le Congo Brazzaville. Et puis, j’ai arbitré au mois de juin 2023, un combat entre l’Angola, le Congo Brazza et la RDC», raconte-t-elle.
A l’aise sur le tapis
«Je n’ai pas peur parce que je fais déjà des combats des grandes catégories. J’ai déjà perfectionné mon travail. Je n’ai pas peur lorsqu’il faut arbitrer un combat des garçons ou des dames. Je suis très à l’aise sur le tapis, vraiment à l’aise contrairement à mon premier arbitrage où j’avais peur. Je me souviens encore de ce jour-là. Il y avait un monde fou. C’était à Maisha Parc. Je me disais intérieurement que si je commets une erreur, quelle sera la réaction du public», affirme sans ambages Niclette Makondele.
Un monde des ingrats
Niclette Makondele révèle que tout n’est pas rose. A moindre faute, le public oublie la bonne prestation réalisée. «Parfois le public profère des injures et il nous lance même des pierres. Cela autant pour des femmes arbitres que pour les hommes». Elle n’est pas épargnée, même dans son club : «Même dans mon club, il m’arrive d’être menacée. En 2021, j’ai arbitré un combat du championnat de Kinshasa, au Stade tata Raphaël. Il y a un de mes lutteurs qui combattait avec un lutteur d’un autre club. Comme mon lutteur avait perdu le combat, tout est retombé sur moi. Les athlètes de mon club sont venus me menacer avec des jets des pierres, alors que je n’avais fait que mon travail. Les gens disent que je suis rigoureuse».
Aux femmes, «surtout celles qui veulent devenir des arbitres comme moi, malgré que ce n’est pas facile, je les encourage. Que les femmes qui ne peuvent plus combattre sur le tapis à cause de leur âge viennent à mes côtés».
Passion
Niclette Makondele dit que c’est par passion et amour qu’elle évolue dans ce métier. «C’est juste une passion. Je fais ce travail par amour. Mon souci est d’encadrer des enfants à la lutte, surtout actuellement avec le phénomène kuluna. A la longue on ne sait jamais, ils peuvent aller loin. Mais nous leur demandons de ne pas négliger les études».
A la question de savoir comment elle arrive à concilier les différentes activités, Niclette Makondele déclare que «C’est juste une question de savoir répartir le temps. Je travaille au labo les lundi-mercredi-samedi de 8h00 à 15h00. Après le travail, je me rends à l’entrainement pour encradrer les petits enfants. L’arbitrage aussi c’est quand il y a une compétition ou un combat amical que je suis sollicitée. Les dirigeants des différentes entités de la lutte m’intéressent bien avant, pour que je puisse harmoniser mon programme».
Props recueillis par Mbangu MAMIYOUND