Salongo : Quand les robinets ne coulent plus

* Depuis deux semaines, trois sur six groupes électrogènes de la Regideso sont tombés en panne à la station de captage de N’Djili, privant d’eau potable les abonnés, renseignent des agents de cette entreprise publique. 

A Salongo, quand le ciel gronde, la population jubile. Dans ce quartier urbanisé de la commune de Lemba en effet, la pluie est toujours la bienvenue. Ce, d’autant que l’eau potable se fait généralement rare. Dans nombre de résidences de ce quartier, les robinets coulent au compte-gouttes, si ils ne sont pas carrément stériles. Ces deux derniers mois, la pénurie d’eau potable s’est amplifiée. Censée alimenter les ménages des abonnés, la Regideso n’arrive plus à satisfaire sa clientèle, contrainte désormais de s’approvisionner auprès de forages. Reportage.         

Tous les matins, Elaka et  »Père double » sont régulièrement sollicités dans les ménages de Salongo Centre. Porteurs, pousseurs de chariots depuis une dizaine d’années, ils font la ronde d’une vingtaine de parcelles du quartier pour recueillir les réservoirs à acheminer dans les forages des alentours. Une fois approvisionnés, ils reviennent dans les familles avec leurs chariots bardés d’une quinzaine de bidons de 25 litres d’eau de fontaine. A la grande satisfaction de leur clientèle qui leur glisse quelques billets de banque en échange de leurs services.

La cinquantaine révolue, Elaka et  »Père double » ne sont pas les seuls porteurs à vendre au quotidien leurs services aux habitants de Salongo. Des dizaines d’autres porteurs profitent désormais de la forte demande en eau de forage pour proposer leurs services dans ces parcelles où les robinets ne coulent quasiment plus.

Empocher 100 dollars au forage…

« Ce commerce est bien rentable. Il nous permet de gagner chaque jour 10, 20 voire 30 dollars de la part de nos clients. Il m’est même arrivé d’empocher 100 dollars à la fin d’une journée, tant les demandes étaient considérables !« , nous souffle Jimmy B., la vingtaine révolue.

« Nos dividendes sont généralement croissants quand les robinets de la Regideso ne coulent pas.  Encore plus quand il ne pleut pas. C’est lors de ces périodes de pénurie que les résidents de ce quartier,  nous supplient de les secourir en les aidant à transporter leurs nombreux récipients « , commente Lipasa, un jeune pousseur de chariot, devenu quasiment indispensable à Salongo Centre où les forages sont devenus des issues de secours pour de nombreux ménages.

« Nous avons tous des robinets et des vannes dans nos maisons, mais ils coulent à peine. D’autres sont quasiment devenus des objets d’arts, tant ils ne fonctionnent pas. Nous sommes, dès lors, tenus de recourir aux moyens alternatifs pour nous approvisionner en eau. Nous recourons ainsi aux eaux des pluies pour nos besoins de ménages« , nous confie Emilie Tshabu, une jeune dame trentenaire, résidant à la 3ème rue de Salongo Centre.

« Faute de mieux, nous nous procurons souvent l’eau de forages pour la vaisselle, la lessive, la cuisine, les toilettes… à raison de 2.000 Fc un bidon de 25 litres. Mais, la qualité de cette eau ne nous convainc pas, d’autant plus qu’elle revêt un goût particulier et peine à glisser sur la peau lorsque nous nous lavons« , renseigne Jojo M., un jeune entrepreneur logé à Salongo Centre.

L’usine de Lemba Imbu, une aubaine

d

A l’annonce de l’inauguration de l’usine de traitement d’eau à Lemba Imbu le 23 août 2022, les habitants de Salongo ont poussé un ouf de soulagement. Nombreux s’attendaient, en effet, à voir enfin leurs robinets couler à flot, grâce à cet important projet financé par la KOICA, l’agence de coopération sud-coréenne. La satisfaction, bien entendu, a été totale dans la commune populeuse de Kimbanseke où se retrouvent des millions de bénéficiaires de la première phase.

 « La mise en œuvre de la seconde phase de cette usine de traitement d’eau n’est pas encore au rendez-vous. Cette phase devrait permettre aux habitants de Kisenso et de certaines communes environnantes d’être approvisionnés. Le cas des quartiers Livulu et Salongo à Lemba, et Debonhomme à Matete… Pour ce faire, la Regideso s’attend à déployer de gros tuyaux pour canaliser l’eau filtrée dans les contrées ciblées« , nous souffle un agent de la direction provinciale de la Regideso à Gombe.

Panne à la station de N’Djili

En attendant cette deuxième phase jugée salutaire, les résidents de Salongo, Livulu, Mbanza-Lemba… espèrent revoir bientôt de l’eau couler de leurs robinets… et à une fréquence plus régulière. Abordé à ce propos, un technicien de la Régideso commis à la station de Salongo révèle la raison de la perturbation de la fourniture d’eau dans cette zone que la régie approvisionne à partir de là. Selon lui, trois de six groupes électrogènes de la station de captage d’eau de N’djili ont lâché il y a trois semaines environs. C’est ce qui expliquerait le faible approvisionnement des abonnés dans ce rayon.

« Aujourd’hui, soupire-t-il, un de trois appareils en panne vient d’être réparé. C’est pourquoi l’on revoit de l’eau couler à nouveau aux heures tardives dans quelques maisons. Pendant la panne, la pression était si faible que nos machines n’arrivaient même plus à pomper de l’eau dans les quartiers environnants situés dans les hauteurs« .     

Des factures fantaisistes

Curieusement, malgré ces pénuries, les factures d’eau ne cessent d’attérir dans les ménages, privés de la moindre goutte d’eau potable. Fixés de manière forfaitaire, les prix mensuels des factures sont loin de plaire aux abonnés. « On nous impose chaque mois une facture oscillant autour de 34.000 Francs congolais, l’équivalent de 15 dollars, alors que l’eau n’arrive chez nous qu’une fois la semaine, voire deux fois le mois. Et souvent quand, fatigués, nous dormons la nuit. Quoique la pression est forte, nous sommes emportés par le sommeil. A notre réveil, c’est, tout déçus, que nous retrouvons des gouttelettes dans nos vannes« , se plaint Jojo M.     

 Témoin de scènes analogues, Hondewa D. déplore aussi la fourniture tardive de l’eau potable dans sa résidence, au quartier Parc, à Salongo Sud. « Il faut être toujours éveillé comme une chauve-souris pour arriver à puiser de l’eau du robinet aux heures tardives« , proteste-t-il. « Chez nous cependant, nous passons des semaines, voire un mois sans voir la moindre goutte d’eau couler de nos pompes. Et pourtant, nous continuons à recevoir des factures mensuelles de plus de 20.000 FC pour de l’eau que nous ne consommons pas« , martèle Roley M. Yves KALIKAT    

Laisser un commentaire

Suivez-nous sur Twitter