La Pr Raïssa Malu n’est plus à présenter. Elle figure parmi les femmes héroines inspirantes que compte la République démocratique du Congo. Forte de sa passion dans les sciences, elle est l’initiatrice de « la Semaine de la science et des technologies. Avec détermination et bravoure, elle est parvenue à enraciner cet événement jusqu’a tenir 10 éditions. Dans une interview exclusive à Forum des As, elle raconte d’où lui est venu ce rêve qui a contribué à faire évoluer les mentalités des Congolais à avoir un autre régard sur le domaine STEM (Sciences, Technologies, Ingénierie et Mathématiques). « J’ai imaginé la Semaine de la Science et des Technologies pour réconcilier les gens avec les disciplines scientifiques« , affirme-t-elle. Chapeau bas à cette femme qui fait bouger les lignes à sa façon dans ce secteur.
Pr Malu, vous avez organisé en avril dernier la 10ème édition de la semaine de la Science et des technologies. D’où vous est venue l’initiative?
Les sciences et les mathématiques suscitent souvent la peur. Vous rencontrez rarement des personnes qui vous disent avoir apprécié les cours de physique et mathématiques durant leurs études. Personnellement, je trouve cela dommage, car j’ai toujours pris beaucoup de plaisir à les étudier et à les enseigner. J’ai ainsi imaginé la Semaine de la Science et des Technologies pour réconcilier les gens avec les disciplines scientifiques, et leur donner l’occasion de découvrir le côté fun et merveilleux de l’exploration de la Nature et de la découverte des Lois fondamentales de l’Univers.
De plus, j’ai eu la chance qu’il y a 10 ans il y avait au sein du ministère de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique une équipe dynamique dirigée par le ministre honoraire Maker Mwangu Famba et la Vice-Ministre honoraire Maguy Rwakabuba. Le Cabinet, l’Administration et l’Inspection Générale étaient ouverts aux initiatives en faveur de l’amélioration de la qualité de l’enseignement et la valorisation du secteur de l’éducation. Cela a facilité la mise en place de ce partenariat public-privé fructueux entre notre association sans but lucratif Investing In people et les ministères de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique, de l’Enseignement Supérieur et Universitaire, et de la Recherche Scientifique et Innovation Technologique.
Quel objectif vise cette rencontre?
La Semaine de la Science et des Technologies vise trois objectifs : Développer une culture scientifique et technologique, promouvoir les savoir et savoir-faire dans ces domaines et susciter des vocations.
Pour atteindre ces objectifs, nous proposons aux visiteurs cinq types d’activités : un Village des sciences avec des animations scientifiques et expositions, des conférences, des concours nationaux, et des soirées de gala.Nous avons également réussi à installer depuis 2022 un réseau de bénévoles qui organisent des activités parallèles dans les provinces de la RDC. C’est probablement notre plus grande réussite, celle avec le plus large impact.
Dix éditions déjà. Quelles sont les péripéties qui ont émaillé les différentes rencontres ?
L’incompréhension a été la difficulté principale. Nous avons entendu des commentaires comme : » Pourquoi elle appelle cet évènement la » Semaine de la Science et des Technologies « , alors que le programme n’est que sur 2 jours ?! » » Concrètement, qu’est-ce qu’on va y faire ? » » Nos élèves fuient les mathématiques et la physique. » » Les élèves ne pourront pas réaliser les activités. » » Elle parle trop vite. » » On n’a pas l’argent pour organiser cet évènement » etc.
Heureusement, les partenaires sont restés ouverts. Nous avons pu cheminer ensemble et faire grandir cet évènement. Nous sommes passés d’un évènement de deux jours à une semaine complète avec plusieurs activités et différentes expériences.
Contrairement à ce que l’on pense, les sciences et les technologies intéressent bien les jeunes, les filles et les garcons ! Le secret est de les présenter et de les enseigner avec plus de fun, de former nos enseignants, de faire confiance aux enfants, d’accepter les erreurs et d’apprendre ensemble.
Dix éditions après, peut-on parler d’un satisfecit ?
Déjà, permettez-moi de vous rappeler les résultats impressionnants des neuf précédentes éditions : 59.530 visiteurs, 400 élèves animateurs et 17 formateurs, 177 ateliers scientifiques, 153 exposants, 113 conférenciers de renommée internationale, dont le Panel Présidentiel chargé d’accompagner la mandature de la RDC à la tête de l’Union Africaine, exercice 2021-2022, 3 concours nationaux et 1 hackathon, 1 livre édité avec les œuvres gagnantes du concours J’aime Lire!, 1 Base de données des Femmes dans les STEM (Sciences, Technologies, l’Ingénierie et les Mathématiques) en RDC et 15 bourses offertes à ces femmes avec le Sultani Makutano, 44 capsules vidéo produites pour le Programme » Apprendre à la Maison « , 10.000 visières 3D produites avec l’initiative COVID-19DRC, 1 prototype de respirateur d’urgence développé avec Women’s Technologies Innovation.
Ensuite, comme je vous le disais, le réseau de bénévoles qui ont organisé des activités parallèles dans les 12 provinces de la RDC (Haut-Katanga, Ituri, Kasaï-Central, Kinshasa, Kongo-Central, Kwilu, Lomami, Lualaba, Mai-Ndombe, Nord-Kivu, Sud-Kivu et le Tanganyika) est pour moi un résultat majeur. Permettez-moi de citer ces 28 équipes, car ce qu’elles ont réalisé est absolument remarquable : Réseau des Associations des Jeunes de l’Ituri (RAJEDI), LUSHINNOV Technologies, CBC Company, Aclast-E, AFA, Aveniria-RDC, Centre Interdisciplinaire pour le Développement et l’éducation Permanente (CIDEP), Jeunes Volontaires pour l’Emploi en RDC (JVE), Les étoiles, Reward structure, Smarter Company, U-Report Masina, VIN SST, Vision Femme, Université Président Joseph Kasa-Vubu (UKV-Boma), Kisantu Nzayilu Network, Team Mbanza-Ngungu SST10, Fondation les oeuvres de nos mains, AJP-RDC ASBL, ACM, STILUALABA, PSB, Pour Elles Initiative & GSWORLD
Les visionnaires ASBL, Institut Kasali / section scientifique, Jambo World, Réseau des jeunes reporters (RJR), Cercle de Réflexion en faveur des écoles de Moba (CREMO).
Enfin, nous avons eu cette année le soutien de l’institution continentale, l’Union Africaine, avec la participation du Commissaire à l’éducation, à la science, à la technologie et à l’innovation de la Commission de l’Union africaine, SEM le Professeur Mohamed Belhocine, et le Marrainage de la Représentante Spéciale du Président de la Commission et Chef de Bureau de liaison de l’Union Africaine en RDC, SE Mme Michelle Ndiaye. Ceci est une reconnaissance du travail de promotion des sciences et des technologies en Afrique que nous réalisons depuis 10 ans. C’est fabuleux !
La 10ème édition a été célébrée sous le thème : » 10 ans de science de technologie au service de la jeunesse. Victoires du passé, espoir du futur « . Pourquoi l’accent a été mis sur la jeunesse ?
Comme il s’agit d’une édition anniversaire, nous avons choisi ce thème afin d’explorer à nouveau les neuf précédentes éditions (rétrospective) et de réfléchir au futur (prospective).
La Semaine de la Science et des Technologies contribue à révéler la prochaine génération de scientifiques congolais, femmes et hommes, qui vont accélérer le développement de la République Démocratique du Congo et de l’Afrique. Depuis 10 ans, nous investissons dans notre jeunesse.
Avez-vous un message particulier?
Avant de conclure, je voudrais remercier notre Marraine sportive, Maitre Nancy Tshiaba, avocate, ceinture noire 4e dan, vice-championne d’Afrique et entraineur adjoint de l’équipe nationale de Karaté de la RDC, d’avoir accepté de s’associer à notre évènement. Pour nous, c’est important, car nous militons pour que nos enfants aient une formation la plus complète possible avec de solides compétences dans les domaines techniques et scientifiques, mais aussi dans le sport et les arts.
J’invite vos lecteurs à visiter notre site Internet pour découvrir les photos et vidéos de l’évènement : www.semainedelasciencerdc.org/programme-edition-2023/
Il faut beaucoup de courage et d’abnégation pour tenir 10 ans. Nous sommes une petite équipe de bénévoles, des passionnés de sciences, d’enseignement et de transmission. Nous croyons en notre jeunesse, en notre pays et en notre continent. Nous vous proposons d’y croire comme nous. Les sciences et les technologies sont nécessaires pour accélérer le développement de la RDC. Pour ce faire, créons ensemble les conditions pour que nos jeunes, filles et garçons, puissent pleinement s’y épanouir. Merci !
Propos recueillis par Mbangu Mamiyound