Le leader d’Envol, et candidat à l’élection présidentielle de 2023, Delly Sesanga, a fait des propositions concrètes à la délégation du Conseil de sécurité de l’ONU qui a séjourné récemment à Kinshasa. C’était lors de la séance de travail qu’il a eue avec la mission onusienne le 10 mars courant. S’agissant de la situation sécuritaire à l’Est et dans la région des Grands-Lacs, Delly Sesanga propose à court et moyen terme le déploiement d’une force internationale pour contrecarrer les tueries dans l’Est de la RDC par le Rwanda sous couvert du M 23. Ce, après avoir noté les limites de la Monusco et l’inaction de la Force des États de l’Afrique de l’Est, EAC, et globalement les difficultés des FARDC.
Quant à l’évolution du processus électoral en vue des élections générales de 2023, le leader d’Envol appelle la classe politique à «procéder à la recomposition de la CENI, dans la liberté pour chaque composante de choisir son délégué, à l’exception du président de la CENI. » Autre proposition partagée avec la mission onusienne, « la révision de la loi électorale, en garantissant le principe de la publication des résultats de vote bureau par bureau».
Lire ci-dessous, l’intégralité de la communication du candidat président de la République Delly Sesanga, lors de sa rencontre avec la délégation de l’ONU. Didier KEBONGO
Communiqué de presse
J’ai eu l’avantage de partager ce 10 mars 2023, au cours de la séance de travail au Fleuve Congo Hôtel, avec la délégation du Conseil de Sécurité de l’ONU en visite à Kinshasa, sur deux points :
• la situation sécuritaire à l’Est et dans la région des grands lacs ;
• l’évolution du processus électoral en vue des élections générales de 2023.
I. SUR LE PLAN SÉCURITAIRE
1. Je relève d’abord que la souveraineté et l’intégrité territoriale de la RD Congo sont encore mises à rude épreuve, avec la recrudescence de l’insécurité, par l’activisme militaire du M23, soutenu par le Rwanda. La résurgence du conflit à l’Est est consécutive au chaos diplomatique et sécuritaire orchestré par une suite des décisions inconséquentes de la stratégie du régime TSHISEKEDI dans la région des Grands-Lacs. Cette stratégie a favorisé l’escalade dans la région sur fond des rivalités entre pays voisins et de surenchère politico-économique. La mise en marge de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba du 24 février 2013, qui constituait pourtant le cadre de référence le plus transversal et inclusif, en matière de paix, de sécurité et de coopération dans la région, a privé de visibilité et d’une feuille de route viable pour la paix et la sécurité. Depuis, les initiatives de paix se démultiplient, sans articulations entre elles, et finissent par se superposer dans la région au plan politique, diplomatique et militaire. Il y a autant de tentatives qu’il y a d’échec. La confusion est totale. La conséquence en est la sur militarisation de la zone, au demeurant abandonnée par l’administration d’État et la justice. Nonobstant la contestation de l’efficacité de la mission de la MONUSCO, la proclamation de l’état de siège sur les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, les opérations militaires bilatérales avec l’Ouganda: «Shuja», ainsi que le déploiement des forces de l’EAC n’ont pas réussi à restaurer la paix dans la sous-région.
2. Sur le plan interne, la politique de ravalement des institutions internes menée par le régime, a conduit à l’érosion du socle de légitimité des Institutions. Plus enclin à s’affranchir de la Constitution, la pratique institutionnelle du régime a miné les équilibres internes en instrumentalisant les clivages, les divisions tribales, ethniques et régionales internes, contribuant ainsi à l’érosion du socle de légitimité des Institutions politiques fragiles, construite sur base de la Constitution de 2006, fruit du compromis des Accords de Sun city de 2002.
3. Dans l’état actuel du conflit, il convient de trouver une solution qui adresse tous les sujets avec une approche à court, moyen et long termes visant à restaurer la paix et la sécurité, en tirant les leçons des défaillances de la mise en œuvre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba et des politiques improductives entreprises par la RD Congo dans la région. Il s’agit de l’État de siège proclamé sans planification et sans financement adéquats, qui a délité davantage l’administration publique et territoriale chancelantes ¡ l’intégration inexpliquée de la Communauté économique des pays de l’Est, en contradiction avec l’objectif énoncé dans l’Accord d’Addis-Abeba de revitaliser plutôt la CEPGL ; les accords bilatéraux de coopération militaire qui ont attisé la méfiance et rivalités entre États de la région ; les accords d’exploitation illicite des ressources naturelles engagées par le Gouvernement dans la région qui ont accentué la course entre les États dans la prise d’intérêt à l’Est du Congo, réduit à un Etat client, en quête de carnet d’adresse contre ses ressources naturelles.
4. Il est dès lors impérieux de réévaluer et relancer l’Accord-cadre d’Addis- Abeba, en tenant compte des éléments et des nouveaux besoins. Il va falloir aussi réexaminer les raisons de l’adhésion de la RDCongo à l’EAC ainsi que tous les accords bilatéraux signés avec les pays voisins, sans l’implication du Parlement. Concernant la superposition des initiatives, il y a lieu de fusionner toutes les initiatives en cours en une seule en renforçant, par le leadership de l’UA, la médiation angolaise conduite par le Président Lourenço pour restaurer la confiance et assurer le dialogue dans la région.
5. Dans cette approche, J’ai en plus sollicité l’ONU à accompagner plus étroitement la RDC dans la mise en œuvre de ses engagements de réformes du secteur de sécurité, en faisant reposer le processus notamment sur l’exigence de coordination des appuis des partenaires dans les différents volets de la réforme et en incluant, au-delà de l’armée, la justice, l’administration du territoire ainsi que les services de renseignement. Le mandat de la MONUSCO n’a pas été suffisamment adapté alors que le niveau des menaces et des tensions sous-régionales croissaient entre les États. Il y a lieu d’envisager, à court et moyen terme, en attendant la réorganisation des FARDC, le déploiement d’une force internationale adaptée au niveau de la menace pour remplacer le déploiement actuel des forces de l’EAC et se substituer à la MONUSCO.
II. SUR LE PLAN PROCESSUS ÉLECTORAL
6. Le processus est gravement compromis à volonté. Le premier enjeu des élections de décembre 2023 vise à assurer la continuité du cycle électoral en conciliant l’impératif des délais constitutionnels avec l’exigence logistique et opérationnelle de l’organisation des élections. La question de la sécurité à l’Est ne devrait pas devenir l’alibi du marchandage du respect du délai constitutionnel contre un glissement de mandat, pourtant programmé par le manque de volonté du pouvoir de tenir les élections à date.
7. Le second défi consiste à conforter la crédibilité, la transparence et la sincérité du processus. Concernant la transparence des scrutins, il y a lieu de noter que les trois piliers de la crédibilité du processus ne sont garantis en amont. Il s’agit de l’indépendance de la CENI assurée par l’inclusivité des parties prenantes, l’indépendance de la justice, en particulier de la Cour constitutionnelle et la clarté de la loi électorale.
8. Par ailleurs, des nombreuses irrégularités et anomalies enregistrées sur le déroulement de l’enrôlement inscrivent le cycle électoral de 2023 dans une courbe qualitativement régressive. Elles couvent les fondements d’une forte contestation post-électorale. Les rapports intérimaires font état d’un processus électoral bâclé, basé sur un plan savamment orchestré de tricherie et de fraude à grande échelle qui se révèle par:
a. La répartition disproportionnée des machines d’enrôlement, privilégiant une tendance manifeste de favoriser l’enrôlement dans les zones supposées favorables à l’Union sacrée et son candidat à la Présidentielle;
b. La non ouverture de certains centres d’enrôlement pourtant prévus dans la cartographie électorale qui sont en réalité des centres fictifs qu’il sied de mettre en liaison directe avec la mise à disposition, par la CENI, des kits d’enrôlement aux acteurs politiques proches du régime;
C. Le monnayage de la carte d’électeur, donc du droit de vote des congolais partout dans le pays.
d. Dans ce contexte et pour un processus électoral apaisé, garant de la cohésion nationale et de la paix sociale, la classe politique a tout intérêt à s’engager à garantir la tenue des élections dans les délais constitutionnels
• Procéder à la recomposition de la CENI, dans la liberté pour chaque composante de choisir son délégué, à l’exception du Président de la CENI, pour qui les composantes religieuses, Catholique et protestante ont renoncé à toute contestation et participation pour s’inscrire totalement dans l’observation électorale;
• Procéder à la recomposition de la Cour constitutionnelle conformément à la loi en vue de mettre fin aux anomalies de la constitution calibrée d’une Cour constitutionnelle ;
• Procéder à la révision de la loi électorale, en garantissant le principe
de la publication des résultats de vote bureau par bureau.
Fait à Kinshasa, le 11 mars 2023
Hon. Delly SESANGA HIPUNGU