Président de la République, Gouvernement, Parlement (Assemblée nationale), Cours et Tribunaux (Procureur général près la Cour de cassation) : bref, tout l’ordre institutionnel congolais préconise la revisitation du contrat sino-congolais en s’appuyant sur le Rapport de l’Inspection générale des finances (IGF), service rattaché à la personne morale de la première institution de la République. Pour quelle finalité cependant ?
Des deux choses l’une: le rapport sera soit confirmé, soit infirmé.
Dans la première éventualité, la partie congolaise sortira victorieuse et aura le choix entre imposer à la partie chinoise la revisitation à ses conditions, c’est-à-dire soit réduire la part de la partie chinoise pour augmenter celle de la partie congolaise, soit imposer carrément la liquidation pure et simple de la joint-venture. C’est ce à quoi s’attend l’opinion acquise à l’IGF malheureusement ignorante de l’article 19 de la Convention qui dispose dans ses quatre alinéas relatifs au cas de force majeure :
– « 19.1. Tous les cas de force majeure seront appréciés conformément au droit commun. Constitue un cas de force majeure tout acte, situation de droit ou de fait, phénomène ou circonstance à caractère extérieur, imprévisible et irrésistible échappant au contrôle raisonnable de la Partie qui l’invoque ».
– « 19.2. Dans l’hypothèse de la survenance d’un cas de force majeure, la Partie affectée notifiera immédiatement et par écrit la situation auprès de l’autre Partie. Au cas où le cas de force majeure dure plus de 60 jours dès la notification, les Parties se concertent pour trouver une solution ».
– « 19.3. L’exécution des obligations des Parties est suspendue aussi longtemps que dure la force majeure ».
– « 19.4. Les Parties à la présente Convention de Collaboration se sont mises d’accord sur le fait que compte tenu de la nature de cette collaboration, l’expropriation, la nationalisation, la promulgation d’une nouvelle loi ou la modification de législation en RDC ne peut, en aucun cas, constituer un cas de force majeure ».
Il y a aussi l’article 20 relatif au règlement des différends et arbitrages avec ces deux alinéas, à savoir :
– « 20.1. Tout différend relatif à l’interprétation et à l’exécution de la présente Convention de Collaboration doit être réglé en priorité par des discussions amiables entre les Parties » et
– « 20.2. Tout différend n’ayant pas été réglé dans les six mois qui suivent ces discussions amiables sera, à la demande de l’une des Parties, soumis à l’arbitrage de CIRDI (Centre international pour le règlement des différends relatif aux investissements) selon ses règles. La langue de l’arbitrage sera la langue française et la langue chinoise. En cas de conflit entre les deux langues, la langue française prévaudra ».
Retenons que jusque-là, la partie congolaise ne disqualifie pas le contrat sino-congolais. Une façon simple de soutenir qu’elle reconnaît l’existence dudit contrat.
Dans la seconde éventualité, la partie chinoise sortira victorieuse et sera naturellement en droit d’imposer à la RDC son ou ses choix. Ça s’appelle effet boomerang.
Dans les deux cas de figure, la question essentielle est de savoir pourquoi On en est arrivé là !
CE PROCÈS APRÈS JOUISSANCE A QUELQUE CHOSE D’INDÉCENT, D’AMORAL, D’IMMORAL
Ce contrat, on ne le dira jamais assez, a prévu la possibilité de revisitation en cas de différends. De ce fait, il n’était pas utile d’en venir là où on en est, c’est-à-dire au bord d’une crise diplomatique!
Et pour cause !
Aspirant à devenir la première puissance économique mondiale, la Chine a une image à préserver. Or, celle du «pilleur des ressources naturelles congolaises» qu’on veut lui coller à la peau au travers du contrat sino-congolais ne passe pas et ne passera certainement jamais. Surtout quand on connaît le contexte dans lequel ce contrat avait été négocié en 2007-2008 et le contexte dans lequel il est maintenant soumis à renégociation.
Pour information, le contrat avait été négocié à l’époque où aucun pays occidental ne voulait investir en République démocratique du Congo depuis les années 1985. En 2 décennies (1985-2005), une grosse croix avait été mise sur ce pays. Et voilà que maintenant, il a soumis à renégociation après que ce contrat a rendu fréquentable, donc crédible la RDC.
En termes simples, la Chine a accepté de se jeter dans la mare aux crocodiles congolaise au moment où les partenaires traditionnels (à la base de l’infection) s’étaient tous défilés parce que n’y croyant plus. Et voilà les mêmes partenaires y revenir après que les Chinois ont asséché cette mare et convaincu le monde entier de la capacité de résilience des Congolais de garder uni leur pays.
Il y a dans l’attitude de certains compatriotes, une sorte de devoir d’ingratitude sur fond d’accusation au pillage !
Aussi, voir aujourd’hui des députés congolais, siégeant dans un Palais du peuple construit et offert par les Chinois, faire le procès de la Chine pour un contrat sino-congolais dont bon nombre ignorent peut-être les tenants et les aboutissants, a tout de la jouissance qui se moque de la bonté !
Pour globaliser l’image, après avoir joui depuis 2008 des bienfaits des infrastructures construites dans le cadre du contrat sino-congolais, notamment et principalement à Kinshasa, voir les Congolais (Kinois) se mettre à réclamer des Chinois des comptes, a de quoi inciter la bonne conscience à se demander pour plaire à qui!
A Félix Tshisekedi ? Pas du tout. A d’autres ? Réponse logique : certainement.
En définitive, ce procès après jouissance a quelque chose d’indécent, d’amoral, d’immoral.
Heureusement que le Chef de l’Etat, dans son droit de vouloir voir clair, met l’accusation devant ses responsabilités. En cas de victoire, l’accusation sablera le champagne !
Mais, et en cas de défaite?
La sagesse conseille de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. M.M.