Kinshasa paralysée

* Prévu hier mercredi, le lancement par le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, du premier module de l’usine de traitement d’eau de la Regideso du quartier Ozone à Ngaliema reporté à ce jeudi 23 février.

* Au regard des scènes d’apocalypse observées dans la capitale après chaque averse, les Kinois s’interrogent : faut-il accorder priorité au curage de caniveaux ou à la démolition de constructions anarchiques sur les emprises publiques?

Boulevard Triomphal, entre le Palais du peuple et le Centre culturel et artistique pour l’Afrique central de Kinshasa, Kabambare…La liste des endroits qui se transforment en lacs, en rivières à la moindre tombée de la pluie dans la capitale congolaise est loin d’être exhaustive. Les Kinois n’oublieront pas de sitôt la dernière pluie qui s’est abattue sur l’ex-Léopoldville hier mercredi 22 février de 9h à 15h alors que se déroulent presque concomitamment les travaux de démolition par l’Hôtel de ville des constructions anarchiques érigées dans les emprises de l’Etat sur cette même ville devenue très insalubre. L’avalanche a été telle que le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi a dû reporter à ce jeudi 23 février la cérémonie de lancement du premier module de l’usine de traitement d’eau de la Regideso du quartier Ozone dans la commune de Ngaliema qu’il devait présider hier mercredi. Et au regard des images d’apocalypse que Kinshasa a vécues hier mercredi après cette flotte, plusieurs Kinois s’interrogent : faut-il accorder priorité au curage de caniveaux ou à la démolition de constructions anarchiques dans les emprises publiques ?

La question est d’autant plus lancinante que la situation malheureuse et meurtrière que vivent les Kinois lors de la tombée des pluies que sa réponse devient de plus en plus urgente. Aujourd’hui comme hier, face aux dégâts que provoque la pluie chaque fois que ses gouttes tombent sur Kinshasa on est en droit de s’interroger : entre les deux actions, laquelle doit être la priorité des priorités pour les autorités de la ville : casser ou démolir les constructions anarchiques (bars, kiosques, boutiques, shops…) érigées sur les emprises publiques ou dégager des caniveaux toutes les ordures qui les obstruent pour que les voies de Kinshasa ne se transforment pas en lacs ou rivières à la tombée d’une moindre pluie ? Pour que notre capitale ne donne plus l’image d’une ville apocalyptique ?

Sans minimiser l’impact de la démolition de ces constructions anarchiques, tout habitant de Kinshasa est sensé se demander ce qui doit être considéré comme la priorité des priorités. Si d’aventure on arrive à poser aux Kinois, dans une sorte de micro-baladeur, la question de savoir entre curer les caniveaux et démolir les constructions anarchiques, l’action prioritaire, bon nombre d’entre eux, sinon, la majorité, n’hésiteront pas à répondre :  » Curer les caniveaux ».

DANGER DE LA DISPARITION DE LA VILLE

Ce n’est pas, estimons-nous, du fait qu’ils soient des victimes de l’opération Kin Bopeto qui les voit perdre leurs gagne-pain qu’ils opteront pour cette réponse. C’est parce que le bon sens veut qu’avoir une ville constamment inondée présente plus de danger de la disparition et de la ville et de ses habitants que des endroits encombrants rendant la ville hyper sale ! Même si les démolisseurs de constructions anarchiques arguent que certaines sont érigées sur des collecteurs d’eau ou des caniveaux !

Aujourd’hui, les autorités congolaises doivent remercier la Providence pour leur avoir épargné une grosse honte et une humiliation sans précédent. Comment allaient-elles se comporter si une telle averse était tombée le jour de la messe du pape François ? Quand bien même la tombée d’une pluie n’est pas de la volonté de ces autorités, il demeure vrai qu’il leur appartient de préparer la ville à recevoir ce genre de précipitations ! Elles n’auraient eu aucun prétexte à avancer auprès de leur hôte de si grande importance qu’est le 266ème pape.

En termes clairs, la priorité des priorités est qu’il n’y ait pas ces images de fin du monde comme celles d’hier mercredi. C’est tout ahuris que des Kinois ont suivi la destruction – presqu’en live – de la route RN1 Kinshasa-Matadi, à Matadi Kibala?  vers l’école Mapinduzi sous les effets des eaux de la pluie. Pas seulement. Cette pluie a vite transformé en  rivière le boulevard Triomphal ainsi que le tronçon entre le Centre culturel et artistique de l’Afrique centrale et le Palais du peuple !

CHAUFFEURS AUDACIEUX

Conséquence, tout était bloqué ou presque car la circulation des véhicules et des motos était régulée par des eaux en furie. Ce sont des chauffeurs audacieux qui ont pu prendre le risque de s’aventurer sur ces endroits inondés où on ne voyait plus où placer les pneus de son véhicule ou de sa moto. On pouvait entendre soit un des passagers ou un receveur s’écrier devant cette rivière et demander au chauffeur de rebrousser chemin de peur de s’enliser !

Alors qu’ailleurs la pluie est synonyme de bénédiction, de bonheur, de joie car apportant une des solutions aux problèmes quotidiens des habitants de Kinshasa, en l’occurrence l’eau dont ils ont besoin pour leurs nombreux besoins (agriculture, lessive, vaisselle), à Kinshasa, particulièrement, à la moindre tombée de la pluie, voire à l’annonce d’une pluie, c’est l’inquiétude voire la panique qui s’installe.

Il ne suffit pas de se mettre à curer seulement les caniveaux. Pour que cette tâche ait un impact sur la société, elle doit s’accompagner de l’éducation citoyenne devant impliquer les bénéficiaires de l’action que sont les Kinois. En ceci qu’il faut y associer le changement des mentalités. En effet, Gentiny Ngobila peut beau avoir s’être lancé dans l’assainissement des caniveaux, le travail n’aura aucun impact à long terme s’il les bénéficiaires ne sont pas directement impliqués. A quoi servirait ce curage si on n’apprend pas aux Kinois de ne pas jeter les ordures dans les mêmes caniveaux curés ? C’est le travail qui incombait au Service des voiries de l’époque qui, à ce jour, n’existe que le nom.

A tout prendre, il est vraiment temps pour Gentiny Ngobila de confier à son équipe et ses bulldozers une autre mission que celle de détruire en urgence ce qui a été construit anarchiquement. Les Kinois voudraient voir une autre opération Kin Bopeto version  » Curage de caniveaux « . La communauté kinoise, principale bénéficiaire de cette action lui en saurait grandement gré.

Les trois mois qui suivent étant traditionnellement réputés très pluvieux, donc, cause très probable de soucis des Kinois, M. Ngobila est appelé à convaincre ses détracteurs. Ceux-ci l’ont toujours accusé de faire peu de cas du curage de caniveaux bien obstrués. Kléber KUNGU

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