18 sur 144 groupes n’est pas représentatif pour instaurer la paix à l’Est

* Le gouvernement est accusé de ne pas assurer la prise en charge des démobilisés dans des sites de cantonnement.

Les négociations de Nairobi au Kenya entre le gouvernement congolais sous l’égide de la communauté des Etats d’Afrique de l’Est par la médiation de Uhuru Kenyatta, le Président kenyan, ont pris fin mercredi dernier. Il faudra attendre une nouvelle séquence qui aura lieu dans les deux semaines. Mais pas un mot sur la force armée de la communauté que celle-ci devait constituer en vue du désarmement de force des groupes armés qui se seraient tenus en marge de ce processus. Une mission titanesque et même irréalisable.

Quant aux négociations qui viennent de se terminer, elles n’ont connu la participation que de 18 groupes armés sur un total de 144 recensés par l’ONU. Ce qui n’est en pas du tout représentatif. Ce qui veut dire qu’avec seulement 18 groupes armés on ne peut pas espérer imposer la paix dans tout l’Est de la RDC. Et surtout qu’il faudra y ajouter une autre difficulté qui fait que plusieurs groupes étaient représentés à Nairobi par leurs dissidents.

En effet, une réalité que la Médiation kenyane n’appréhende pas et qui est que chaque groupe armé actif a plusieurs dissidents dont la plupart sont seuls et n’ont pas de combattant à commander. La difficulté qui se présente est dès lors de négocier avec ceux qui ont effectivement le contrôle de leurs hommes. Autrement, ils ne se sentiraient pas concernés par des décisions qui seront prises à l’issue des négociations de Nairobi et ne les appliqueront pas. Ce qui veut dire qu’il n’y aura jamais la paix dans l’Est de la RDC étant donné que celle-ci passe par l’implication des groupes armés qui doivent accepter de désarmer volontairement. Ce qui veut dire qu’avant Nairobi risque d’être égal après. On aura donc perdu et du temps et de l’énergie et de l’argent pour rien.

La première manche de ces négociations de Nairobi n’a pas donné grand-chose. D’autant plus que la médiation kenyane n’a pu prendre à son hameçon que du menu fretin. Là où les délégués de la Présidence de la république qui représentent le gouvernement parlent, eux, d’un succès total. Succès total ? Avec seulement une représentation de 18 groupes armés sur les 144 et surtout sans la participation de la CODECO (Coopérative de développement du Congo) du chef de guerre Lendu Justin Ngunjolo qui contrôle des pans du territoire d’Ituri, ou du NPC/R (Nduma defense of Congo/Renové) du chef de guerre Nanga Guidon Shamirayi autoproclamé «Général d’Armée» qui contrôle les forêts denses de Walikale et qui peut aller jusqu’à 5.000 combattants dans son escarcelle. Même chose au Sud-Kivu avec l’ancien général des Fardc Yakutumba son Maï Maï Yakutumba, qui tient aussi les forêts denses de Fizi-Baraka avec aussi son armée de 5.000 éléments. Lui non plus n’a pas fait le déplacement pour Nairobi pour discuter avec le gouvernement congolais dont lui, Yakutumba, contente la légitimité et il y avait même dit autrefois qu’il avait un plan pour conquérir la ville de Kinshasa.

La paix dans l’Est de la RDC n’est possible qu’avec l’implication de ces trois groupes armés. Dans l’entretemps, les 18 qui étaient présents ont déploré leurs cahiers des charges. On y retient surtout que généralement le gouvernement congolais ne respecte pas les engagements qu’il prend avec les groupes armés. Il démissionne surtout quand il s’agit de la prise en charge des démobilisés dans des sites de cantonnement. Ces démobilisés sont souvent abandonnés à eux-mêmes, sans moyens de subsistance et sont laminés par la faim. Ce qui fait que, n’en pouvant plus, ils quittent ces sites de cantonnement pour la brousse où ils reprennent les armes, alors qu’ils étaient déjà à l’étape de la démobilisation, mais ils sont contraints de faire marche-arrière. Par la faute du gouvernement. Une situation qu’on rencontre dans tous les sites du programme DDR (Désarmement, démobilisation, réinsertion) devenu maintenant Désarmement, démobilisation, réinsertion, relèvement et stabilisation (DDRRS).

En ce qui concerne le FRPI (Front de résistance patriotique de l’Ituri) un groupe armé d’Ituri qui est le seul à avoir fait le déplacement pour Nairobi, ses délégués ont abondé dans le même en enfonçant davantage le clou qu’en 2020, leur groupe avait signé un Accord de paix avec le gouvernement qui prévoyait le désarmement de tous les combattants, ce qui a été fait. Mais les fonds prévus pour leur réinsertion n’ont jamais été débloqués et ces démobilisés du FPRI continuent à attendre. Là, c’est pour les combattants. Quant à leurs commandants, le gouvernement leur avait promis l’intégration dans les FARDC ou dans l’administration politique. Ce qui n’a jamais été fait jusqu’à ce jour. Les leaders du FRPI continuent à attendre jusqu’à ce jour, ils n’ont vu ni intégration dans les FARDC ni dans l’administration politique promis par le gouvernement.

Comme on le voit, le programme « Désarmement » est le talon d’Achille du gouvernement congolais. Ce programme est toujours sans moyens. Comment va-t-on les mains vides assurer la réinsertion des combattants qui sont mobilisés. Cette défaillance est un mauvais signal pour les autres combattants actifs qui voulaient prendre le chemin du désarmement volontaire. Le gouvernement fait une chose et son contraire. A Nairobi toujours, les deux ailes du M23, celle de Sultani Makenga venant de l’Ouganda et celle de Jean-Pierre Runiga du Rwanda, lui reprochent aussi de ne jamais respecter ses engagements. Comme par exemple ceux consignés dans l’Accord-cadre d’Addis-Abeba.

A ce sujet, le gouvernement n’a jamais intégré dans les institutions de l’Etat comme promis ni pour assurer le retour au pays des combattants du M-23 réfugiés en Ouganda et au Rwanda en les contraignant à l’exil forcé. Le M23 de Sultani Makenga ajoute pour sa part que c’est non-respect des engagements pris dans des Accords signés qu’ils ont été contraints de déterrer la hache de guerre et de lancer les hostilités dans la territoire de Rutshuru. La balle est dans le camp du gouvernement. KANDOLO M.

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