Nouvelle polémique entre Kinshasa et Kigali. L’armée congolaise accuse le Rwanda de soutenir les rebelles du M23 qui sévissent dans la province du Nord-Kivu. « C’est faux », réplique le Rwanda. Patrick Muyaya est le ministre congolais de la Communication et des Médias, il est aussi porte-parole du gouvernement. De passage à Paris, il s’exprime sur ce dossier, mais aussi sur le dernier sondage qui donne le président Tshisekedi en baisse.
RFI : Au Nord-Kivu, le gouverneur militaire affirme que les rebelles du M23 sont soutenus par l’armée rwandaise, mais le gouverneur de la province rwandaise de l’Ouest réplique que l’armée rwandaise n’est en aucune façon impliquée, alors qu’est-ce qui se passe ?
Patrick Muyaya : Il y a eu une incursion des militaires M23, c’est la deuxième fois et c’est les mêmes méthodes. On connait plus ou moins la proximité qui a toujours caractérisé ces forces rebelles avec le pays dont vous parlez. Évidemment, si les militaires en parlent, sûrement qu’il y a des éléments de terrain qui peuvent l’attester, mais aujourd’hui nous ne voulons pas nous focaliser sur ces choses parce que nous pensons qu’il est temps de construire une relation de paix dans la sous-région et depuis l’arrivée du président de la République aux responsabilités, vous avez senti qu’il y a cette volonté d’ouverture avec nos pays voisins. Donc il y a des mécanismes, il y a des voies diplomatiques qui seront utilisées pour clarifier tout ça dans la sous-région des Grands lacs.
Oui, mais ce lundi, le gouverneur militaire du Nord-Kivu a présenté deux militaires rwandais qui auraient été faits prisonniers, avec leurs noms, leurs grades, est-ce que ce n’est pas une accusation valable ?
On ne va pas aller dans cette rhétorique de militaire pour lequel il y a des mécanismes de vérification qui existent entre les deux pays, les mécanismes seront activés. Vous avez vu que le président de la République a rencontré le président Kagame il y a quelques jours en Jordanie. Des contacts diplomatiques vont se faire pour que ces choses, si elles s’avèrent, puissent être clarifiées, et c’est cela la volonté du président.
La présidentielle est prévue en décembre 2023, mais dans le camp du président certains évoquent un glissement possible de cette date sous prétexte que le président a perdu les deux premières années de son mandat actuel dans des luttes de pouvoir avec son prédécesseur, alors qu’en est-il ?
Ceci relève de la pure rumeur. Tout ce que nous faisons, nous le faisons avec une deadline, le président de la République est un démocrate bien connu, vous connaissez de quel parti il vient. Nous tous tenons à ce que ces élections se tiennent dans les délais pour permettre aux Congolais d’exprimer leurs voix librement et de choisir le président qu’ils souhaitent.
En décembre 2023 ?
C’est ce que prévoie le calendrier.
Le jour du vote, s’il se représente, le président Tshisekedi défendra son bilan, mais au vu du sondage publié par le bureau d’études Berci, et le Groupement d’étude sur le Congo, les opinions favorables au chef de l’État sont tombées de 54% il y a un an, à 29% aujourd’hui, est-ce que ça ne vous inquiète pas ?
Ça ne nous inquiète pas du tout, d’autant plus qu’un sondage, c’est la photographie du moment. Le même sondage dit aussi que personne dans la classe politique ne tire véritablement profit de ce contexte, et nous nous pensons depuis l’arrivée au pouvoir du président Tshisekedi que nous allons apporter des solutions. Aujourd’hui, la gratuité est effective, plus de 4 millions d’enfants ont repris l’école. Nous parlerons bientôt de la couverture santé universelle pour permettre à des millions de Congolais d’avoir accès à des systèmes de santé. Tout cela est dans un contexte économique assez difficile, nous faisons des progrès et nous pensons que le moment venu, les Congolais sauront quel choix il faudra faire.
Près de 130 millions de dollars d’argent public détournés sous l’ère Joseph Kabila, c’est la révélation de l’enquête Congo Hold-up, réalisée par RFI et 18 autres médias et cinq ONG. Comment vous réagissez à cette enquête ?
D’abord nous n’avons pas été surpris parce que la question qui avait fait l’objet de cette enquête est une question qui avait déjà été abordée précédemment et la banque en l’occurrence (BGFI) qui avait été épinglée justement pour ces pratiques avait eu le temps de faire le nettoyage, notamment en mettant de côté tous ceux qui étaient de près ou de loin liés ou concernés par ce qui a été dit au centre de cette enquête. Évidemment il y a eu des noms qui ont été cités, je crois que la ministre de la Justice avait demandé l’ouverture d’une information judiciaire qui suit son cours pour voir dans quelle mesure établir des responsabilités là où il faut les établir pour que les conséquences puissent être tirées. Mais ici il faut rappeler que la lutte contre la corruption pour le président Tshisekedi, c’est un pilier. Ça veut dire que ce sont des choses qui se sont passées il y a plusieurs années, mais depuis vous avez vu que l’Inspection générale des finances a été remise au centre des débats, et que régulièrement l’IGF fait des rapports, épingle certaines autorités, mais tout ça, ça sert de pédagogie, ça sert de garde-fou pour prévenir tout type d’initiatives qui va faire perdre des ressources ou de l’argent au Trésor public. RFI