L’assaut diplomatique de la Turquie

La Turquie fournit d’importants efforts de médiation entre l’Ukraine et la Russie depuis le début de la guerre. Grâce à une politique étrangère « entreprenante et humaine » développée par le président turc Recep Tayyip Erdogan, elle a également réussi à rassembler environ 40% des pays du monde lors du 2ème Forum diplomatique d’Antalya.

Alors que la guerre se poursuit en Ukraine, la Turquie a accueilli du 11 au 13 mars 2022 le 2ème Forum diplomatique d’Antalya dont la devise était « penser ensemble, agir ensemble« .

Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavusoglu a précisé que le forum représentait, au plus haut niveau, plus du tiers, environ 40% des pays du monde avec la participation de 17 chefs d’Etat et de gouvernement, 80 ministres et 39 organisations internationales, de 75 pays différents.

Intense trafic diplomatique

Le forum fut tout d’abord marqué par la première rencontre des ministres des Affaires étrangères russe et ukrainien depuis le début de la guerre en Ukraine. Malgré l’échec d’obtenir un cessez-le-feu, les tentatives de médiation de la Turquie entre les parties belligérantes ont été saluées par la presse étrangère.

« Pourparlers en Turquie : pas d’accord de cessez-le-feu, mais la diplomatie au rendez-vous« , a titré Le Figaro pour résumer les pourparlers entre les ministres russe et ukrainien, qui ont duré 1h40 en présence du ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavusoglu.

Le président Erdogan a annoncé le 15 mars que le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavusoglu avait été dépêché mardi « à Moscou » où il aura des entretiens mercredi puis se rendrait « en Ukraine » jeudi afin de rechercher un cessez-le-feu.

Le 14 mars, le chef du département de la communication de la présidence turque, Fahrettin Altun, a également souligné que le président Erdogan avait rencontré 14 dirigeants au cours des cinq derniers jours, dont le dernier en date fut le chancelier allemand Olaf Scholz.

Nouveaux débuts

Parmi toutes les rencontres du président turc, il y en avait deux qui attiraient une attention particulière : la rencontre avec le président israélien, Isaac Herzog et celle avec le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis.

Si la Turquie entretient un rapport difficile avec Israël et la Grèce, les visites officielles de leurs représentants dans le pays ont donné une lueur d’espoir quant à l’avenir des relations bilatérales.

« La visite du président israélien, Isaac Herzog, en Turquie, la première d’un haut responsable israélien depuis quinze ans, marque un tournant dans les relations longtemps houleuses entre les deux pays« , a souligné Le Courrier International. Pour expliquer les raisons d’un tel rapprochement, on peut principalement évoquer le projet d’amener le gaz israélien en Turquie via un gazoduc en Méditerranée orientale. Et puis ajoutons le fait que les deux pays avaient partagé la même position dans le Haut-Karabakh en soutenant l’Azerbaïdjan et se proposent actuellement comme médiateurs dans la guerre en Ukraine.

En ce qui concerne la réunion du Premier ministre grec avec le président turc en Turquie, elle s’est également déroulée dans une atmosphère positive. « Malgré les désaccords entre la Turquie et la Grèce, il a été convenu de maintenir ouverts les canaux de communication et d’améliorer les relations bilatérales« , a déclaré un communiqué de la présidence turque, selon lequel les deux dirigeants ont abordé le conflit en Ukraine et leurs différends en Méditerranée orientale. La Grèce cherche aussi à rétablir le contact avec la Turquie après l’annonce par Washington de son retrait de soutien du projet de gazoduc EastMed et le rapprochement turco-israélien.

Enfin, une dernière visite qui a suscité un grand intérêt en Turquie fut celle du chancelier allemand Olaf Scholz. C’était sa première visite officielle en Turquie depuis le début de son mandat. Scholz a fait des annonces importantes au sujet des relations turco-allemandes mais aussi l’avenir des relations entre la Turquie et l’UE.  « La Turquie et l’UE coopèrent. Nous avons des projets pour l’avenir. Par exemple, nous mettrons en œuvre des formats de dialogue de haut niveau. Nos négociations sur l’union douanière se poursuivront« , a-t-il déclaré. Il a également exprimé la volonté de son pays de « mieux utiliser le grand potentiel de ses relations » avec la Turquie.

Enfin, l’année 2022 est marquée par un grand changement dans la politique étrangère de la Turquie. « La Turquie n’a pas été aussi proactive sur le plan diplomatique depuis les années 2000« , note Jana Jabbour, enseignante à Sciences Po. En améliorant ses relations un par un avec tous les pays avec lesquels elle a vécu des problèmes dans le passé, la Turquie renforce ainsi sa position sur la scène internationale. Par Öznur Küçüker Sirene

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