Les projecteurs sont braqués sur la femme en ce mois de mars. De par le thème national retenu cette année : » L’autonomisation des femmes et des jeunes filles dans la lutte contre le changement climatique et la réduction des risques des catastrophes « , Forum des As a donné la parole à Mme Carine Mauwa, évoluant dans le secteur de l’environnement. Chargée de Mesure Notification et Vérification (MNV) et Clause Sociale au Fonds mondial pour la nature (WWF), Carine Mauwa estime que l’autonomisation de la femme ne peut être effective que par le renforcement des capacités, l’accès à l’école, l’octroi de bourses d’études pour la filière environnement. Interview.
Voudriez-vous vous présenter à nos lecteurs et parler de votre travail au WWF ?
Je suis Carine Mauwa, experte en suivi et évaluation dans le cadre du Mécanisme de paiement pour services environnementaux (PSE) spécifiques aux activités de restauration du couvert forestier (reboisement, agroforesterie, mise en défense des savanes). En tant que chargée de clauses sociales, j’en assure le suivi dans le cadre du contrat de concession forestière signé entre les concessionnaires forestiers cibles et les communautés locales ou les peuples autochtones riverains pour une exploitation durable des forêts. Je suis affiliée au projet Nicfi, c’est-à-dire freiner la déforestation et la dégradation des forêts en RDC. C’est un projet de programme forêt qui a pour objectif de contribuer à la réduction de la déforestation et la dégradation des forêts dans le sillage du Lac Tumba, dans la province du Maindombe. Tout en soutenant les concessionnaires forestiers industriels cibles et les producteurs de cultures pérennes dans la mise en œuvre de bonnes pratiques de gestion durable de leurs opérations. Je travaille avec les communautés au niveau local, les administrations provinciale et nationale, les concessionnaires forestiers.
Comment avez-vous intégré cette ONG internationale spécialisée dans la protection de nature?
Je suis agronome de formation du département de gestion des ressources naturelles avec un master en Aménagement des forêts et territoires. Lorsque j’ai vu l’offre du WWF recherchant un chargé du MRV pour un projet Redd +, ce fut une opportunité pour moi de postuler à fin d’appliquer la conservation avec l’implication des communautés. Et cela en améliorant leurs conditions de vie à travers les bénéfices générés par leurs efforts de gestion durable des forêts, soit à travers les bénéfices carbones ou par le fonds de développement provenant de l’exploitation durable des forêts. Ainsi donc les communautés locales ne seront pas un obstacle pour la conservation de la nature mais feront plutôt partie de la solution pour une gestion durable des ressources naturelles.
De par votre fonction, vous êtes une femme de terrain. Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontée en tant que femme?
Les stéréotypes liés au genre, certaines coutumes dans certains milieux où la femme, être faible, ne pas parler devant les hommes… Ces stéréotypes sont encore d’actualité malheureusement. Alors, quand je rencontre des gens qui me disent que je fais un travail d’homme… Je profite de l’occasion pour leur démontrer ce dont la femme est capable. Et, j’explique aux communautés que nous sommes tous concernés par la gestion durable des ressources naturelles. Aucune catégorie ne doit être négligée. Aux parents je demande d’envoyer leurs filles à l’école pour qu’elles soient comme moi, ou qu’elles me dépassent même en devenant des professeures ou autres, car elles peuvent mieux faire. Il suffit juste qu’on leur donne leur chance… Ainsi nous sensibilisons les hommes et les femmes aux droits de la femme et à sa participation effective dans la gestion des ressources naturelles. La loi congolaise est claire là-dessus.
Que pensez-vous de l’égalité homme-femme ?
Je pense que nous sommes tous appelés à donner le meilleur de nous-mêmes pour un développement durable. Je suis pour l’inclusion et la complémentarité. Que nous ayons tous les mêmes chances pour étudier lorsque les moyens sont limités. Ce n’est pas parce que je suis une fille et appelée à me marier que je n’ai pas le droit d’étudier comme mon frère. Je suis pour que les femmes accèdent aux postes de décisions, exercent les mêmes métiers que les hommes, et touchent le même salaire lorsqu’ on occupe les mêmes fonctions. Il ne doit pas y avoir de discrimination ou de déconsidération pour des raisons liées au genre.
Par rapport au thème national retenu cette année, qu’est-ce qui, selon vous, doit être encore fait pour une autonomisation réelle de la femme?
Il est important de saluer toutes ces initiatives prises dans le cadre de l’autonomisation de la femme dans ce contexte où elle se trouve être la première victime du changement climatique car, étant la première utilisatrice de la forêt. Celle-ci est un peu comme un super marché pour la femme. Elle y trouve de la nourriture pour sa famille, des médicaments, et bien d’autres produits nécessaires à sa survie et celle de son foyer. En la rendant autonome au travers des activités génératrices de revenus, respectueuse de l’environnement, c’est la meilleure façon de contribuer à la lutte contre le changement climatique tout en préservant la forêt et en améliorant les conditions non seulement de la femme mais aussi de toute sa famille. Ainsi pour une autonomisation réelle, il faudrait renforcer la sensibilisation à l’accès des femmes à l’école, la mise à disposition des bourses d’études dans des filières bien spécifiques à savoir : les technologies, l’environnement, l’agriculture, la pharmacie etc. Il faudrait aussi des microcrédits pour financer leurs activités, des programmes d’alphabétisation, mais aussi développer des programmes d’échanges d’expérience entre les femmes…..
En fait c’est ce que le WWF fait à travers ses projets d’autonomisation de la femme. Il y a toute une stratégie genre mise en place. Nous avons des activités d’alphabétisation, de renforcement des capacités, foyers améliorés, biogaz, chikwange améliorée. Au WWF, nous avons toute une stratégie genre. La représentativité des femmes dans chaque activité est effective d’au moins 30%. Propos recueillis par Fyfy Solange TANGAMU