Diabolisation des entreprises chinoises : après Sicomines, Huawei !

C’est reparti. Qui de raisonnable dans ce pays pouvait un seul instant imaginer que pour alerter les animateurs actuels des institutions de la République sur une prétendue pratique d’espionnage, dont ils seraient aujourd’hui l’objet de la part des Chinois via Huawei, on se servirait le 10 janvier 2022 d’une information publiée une quarantaine de jours plus tôt, le 1er décembre 2021, dans le cadre du dossier « Congo hold-Up « ! Et qu’en plus, la preuve sur laquelle on s’appuie soit, tenez bien, les suppositions d’espionnage avancées en 2015 par Fred Bauma, activiste de Lucha. Les articles publiés le 10 janvier 2022 ont tout d’un cheveu dans la soupe, ce d’autant plus que dans le contexte politique et diplomatique congolais actuel, rien ne justifie ni n’explique pareil matraquage médiatique. C’est qu’il y a anguille sous roche…

Trois médias ont fait état d’un espionnage des institutions congolaises par le groupe chinois Huawei. Ces  organes s’appuieraient sur le sulfureux rapport « Congo Hold up.

Le premier introduit son article en ces termes : « Le rapport Congo Hold-up a réservé l’essentiel de ces pages au clan de l’ancien Président Joseph Kabila, qui l’a contesté via ses avocats et promis de porter plainte contre les auteurs du brûlot. Mais certains passages de cette enquête parlent du groupe chinois Huawei et l’accusent d’avoir espionné les institutions de la République démocratique du Congo. Lisez plutôt les extraits de Congo Hold-up ». Et d’ajouter : « Les révélations de Congo Hold-Up n’en finissent pas de surprendre les Congolais. Si le clan de l’ancien Président de la République Joseph Kabila a été mis en cause, c’était également avec le concours du géant chinois Huawei« .

Le deuxième introduit le sien par ces termes : «Si le clan de l’ancien président de la République, Joseph Kabila a été mis en cause, c’était également avec le concours du géant chinois Huawei. Comment s’enrichir ? Aura été le plus grand mobile de cette société chinoise qui, au regard des résultats des enquêtes de Congo Hold up, a été impliquée dans la mafia avec la bénédiction de certains proches de l’ancien chef de l’état« .

C’est dans la suite que les deux premiers font jonction en révélant que c’est en 2013 que le régime Kabila a passé un autre contrat avec le groupe Mer incluant l’installation des nouvelles caméras de surveillance, de maintenance technique et de formations à l’espionnage « avant de perfectionner son système de surveillance en 2015 grâce à du matériel fourni par le Chinois Huawei« .

A ce stade, une question de bon sens est à soulever. Le contrat, déclarent-ils, a été signé en 2013 entre le régime Kabila et le groupe israélien Mer tandis que le matériel perfectionné a été fourni en 2015 par Huawei.

Les auteurs ne démontrent cependant pas comment la firme chinoise s’est subtituée au groupe Mer pour espionner hier des opposants congolais (le seul exemple cité est celui de Fred Bauma de Lucha) et aujourd’hui, comme l’affirme le premier journal, les animateurs des institutions de la République aux affaires. Dans le dernier paragraphe, commençant par se demander ce qu’est devenu ce programme de formation de 2015 à ce jour, ce média va dans la supposition en relevant qu’ »Il semblerait que c’est Huawei RDC qui en détient les secrets« , écrit-il avant de faire pire en déclarant exactement ceci : «Si les révélations de Congo Hold-up s’avéraient vraies, on pourrait déduire que la société Huawei RDC espionne depuis plusieurs jours maintenant, les institutions congolaises».

Cette conclusion ne relève d’aucune logique si ce n’est de celle de la campagne de diabolisation menée à partir d’une ambassade à Kinshasa, officine dont la mission première a cessé de promouvoir les investissements de son pays en RDC – terrain sur lequel elle est attendue – parce que la vérité est que son gouvernement n’en a plus les moyens. Aussi, pour assurer son existence, cette ambassade se découvre le créneau de mobiliser les médias africains pour attaquer tout ce qui s’apparente à la République Populaire de Chine :  personne humaine (communauté), œuvre humanitaire, industrie, commerce, services etc. et même pays en coopération gagnant-gagnant avec Beijing).

DES MEDIAS AFRICAINS SOLLICITES ONT DIT NIET !

Cette diabolisation a une date d’officialisation en RDC : 15 novembre 2021. Ce jour-là, cette officine diplomatique en poste à Kinshasa a réuni en sa résidence des responsables de quelques médias avec pour consigne une campagne de dénigrement d’un géant mondial de l’Informatique en contrepartie d’une enveloppe. Certains ont cédé, d’autres ont carrément refuse.

Si dans l’article paru à cette occasion en novembre 2021 sous l’avant-titre « Menée par le corps diplomatique »  et le titre « La campagne médiatique contre la Chine désormais officialisée en RDC« , l’auteur s’est abstenu d’en citer la dénomination, la campagne ouverte le 10 janvier 2022 justifie de le faire. Il s’agit de Huawei.

Des médias africains ont été sollicités à cette fin en 2021. Cas des journaux zimbabwéens comme The Herald ayant ouvertement dénoncé cette corruption dans sa livraison du 21 septembre 2021. Selon des sources recoupées, plusieurs médias des Etats africains comme l’Éthiopie, le Soudan, le Soudan du Sud, l’Ouganda, le Rwanda, la Tanzanie, la Zambie, le Malawi, le Botswana, la Namibie, l’Afrique du Sud et Mozambique ont été approchés pour diaboliser la Chine. Ils ont dit niet !

HUAWEI, SIMPLE FABRICANT DE MATERIEL INFORMATIQUE

La petite réflexion que les médias peuvent développer est de savoir pourquoi ceux qui se targuent de détenir la science infuse en hit-tec ne fournissent pas eux-mêmes la preuve des actes d’espionnage et de contre-espionnage auxquels se livrerait Huawei en RDC contre les autorités congolaises, encore que cette entreprise ne peut formellement être accusée de l’un ni de l’autre.

En effet, Huawei est un fabriquant de matériel informatique au même titre que Cisco, Western Digital, Seagate, Maxtor, Samsung, mSpy, Pegasus. Ce n’est pas pour autant une raison de les soupçonner ou de les qualifier d’espionnage ou de contre-espionnage puisqu’ils ne le sont ou ne le font pas.

Pourquoi alors ce qu’on ne dit pas de ces firmes américaines et européennes doit-il devenir vérité lorsqu’il s’agit de la firme chinoise Huawei ?

Ce n’est ni plus, ni moins que du mépris.

Ce n’est ni plus, ni moins que de la  « chinophobie« .   

       Simon Mutombo/Correspondace particulière

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