Les opérateurs agricoles du Nord-Kivu font face à une multiplicité de taxes dans leur secteur. Au total 26 services étatiques imposent et perçoivent « illégalement » une centaine de taxes, révèle une enquête de la Fédération des organisations des producteurs agricoles du Congo au Nord- Kivu (FOPAC NK). Ce n’est pas tout. 40% de ces fonds collectés vont vers une autre destination que celle du Trésor public. Ce qui, selon les initiateurs de l’étude, fait perdre à l’Etat congolais chaque année plus de 60% de ses recettes dans le secteur agricole du Nord- Kivu.
Ces services étatiques, souligne-t-on, sont un grand obstacle dans la promotion du secteur agricole du Nord-Kivu ». Parce qu’au lieu que ces fonds profitent à l’Etat, ils ne servent qu’à des individus : «40% de ces fonds collectés passent de mains à mains et n’arrivent jamais à la caisse de l’Etat», notent les résultats.
Selon le responsable des programmes et mobilisation des ressources financières de l’ONG Belge Rikolto, Ivan Godefroid, ces tracasseries découragent les agriculteurs et les entrepreneurs potentiels. « On constate que la fiscalité aujourd’hui décourage les entrepreneurs agricoles. Et donc, aussi longtemps que les taxes sont aussi multiples et aussi lourdes, on va décourager tous ceux qui veulent nourrir la population congolaise, et, on va accroître la dépendance des aliments importés de l’extérieur. Les services étatiques, en imposant beaucoup de taxes, pensent qu’ils vont augmenter les recettes, mais c’est le contraire qui arrive ».
VIVEMENT UN GUICHET UNIQUE
Il souligne par ailleurs que quand il y a plusieurs taxes, les producteurs et les exportateurs s’orientent vers l’illégalité et la fraude. Il estime que trop de taxes font fuir les gens et des produits avec comme conséquences moins d’investisseurs. C’est finalement l’Etat qui est le grand perdant.
Parmi les percepteurs, l’on cite notamment les milices. Certaines taxes sont dupliquées juste pour tromper la vigilance de ces opérateurs agricoles.
C’est ainsi qu’on recommande au gouvernement de mettre en place un guichet unique afin d’éviter ce genre des tracasseries qui ne fait pas bénéficier l’économie de notre pays.
La FOPAC NK envisage une catégorisation de la fiscalité selon les filières ou spéculations agricoles afin de permettre au contribuable de déterminer les taxes auxquelles ils sont soumis. Quant à l’information sur la nomenclature des taxes dans le domaine agricole, il faut vulgariser les textes légaux et/ou les nomenclatures auprès des producteurs agricoles. A la FOPAC NK d’enrichir le document d’enquête sur la fiscalité en agriculture.
L’enquête sur l’environnement fiscal dans le secteur agricole dans la province du Nord-Kivu a été menée en novembre dernier dans cinq territoires de cette partie de la RDC. La restitution a eu lieu lors de l’atelier organisé par la FOPAC NK avec l’appui financier de Rikolto. La rencontre a réuni sept services étatiques, le cabinet du gouverneur, la police, la FEC et les coopératives des caféiculteurs au Nord Kivu le 13 décembre à Goma. L’enquête a été réalisée auprès de 36 opérateurs économiques du secteur agricole dans cette province, victimes de tracasseries fiscales. L’étude a identifié au total 26 services étatiques qui imposent et perçoivent des taxes illégales et illicites auprès des opérateurs agricoles.
Cette enquête de la FOPAC, a précisé la chargée de plaidoyer au sein de cette structure, Me Annette Kanyere, visait à identifier toutes les perceptions des services étatiques auprès des opérateurs agricoles, réfléchir ensemble sur les stratégies de réduction des taxes et lutter contre les perceptions illicites dans le secteur agricole. Dina BUHAKE