Le président de la République, Félix Tshisekedi a lancé hier mercredi 20 octobre à Kinshasa, les travaux de la table ronde inclusive sur la mise en place d’un fonds national de réparation en faveur des victimes des survivants des violences sexuelles perpétrées en temps de conflits en RDC. Une initiative de la Première Dame, Denise Nyakeru Tshisekedi, en sa qualité de championne globale des Nations Unies pour la prévention des violences sexuelles. Cet atelier va également plancher sur la proposition de loi portant sur la politique nationale de réparation.
Ce forum qui se clôture ce jeudi 21 octobre a comme objectif principal, celui de mettre autour d’une même table toutes les parties prenantes concernées par la question, afin d’échanger sur la mise en œuvre d’un fonds national de réparation et de la loi portant politique nationale de réparation.
Dans son speech, le chef de l’Etat a appelé chaque acteur à mettre la main à la pâte en formulant des stratégies innovantes pour la constitution d’un agenda commun assorti des solutions politiques acceptées. Celles-ci devront démontrer qu’il est encore possible de mettre en œuvre des mécanismes de réparation qui tiennent également compte des réalités. Le Président de la République a pris l’engagement d’inscrire la question comme une priorité du Gouvernement et à veiller à sa mise en œuvre dans le but de réparer les crimes se rapportant aux violences sexuelles.
Le Président Félix Tshisekedi a fait savoir que l’abondance de nos richesses naturelles ne cesse d’attirer les prédateurs de toute sorte et alimente une guerre asymétrique aux ramifications régionales et internationales. «La question de la responsabilité des massacres commis en RDC reste au centre des préoccupations majeures au niveau tant national qu’international. Prenant la mesure de la situation et mû par la nécessité d’éradiquer des violences sexuelles commises en temps de conflit, le Gouvernement et les Nations Unies ont signés un communiqué conjoint, où la RDC s’était engagée à veiller à ce que les victimes, ainsi que leurs membres de famille aient un accès à la justice et une juste réparation, en accélérant le processus d’adoption d’une loi au profit des victimes des violences sexuelles liées au conflit tout en assurant son approvisionnement», dit-il.
Ainsi, des années durant, le Gouvernement et la société civile ont réfléchi sur différents types de réparations, voire des programmes ad hoc à mettre en œuvre pour que chaque victime y participe. Ceci a conduit le ministère des Droits humains à initier un projet de décret portant création du Fonds national de réparation et de la commission nationale de justice transitionnelle en RDC qui seront débattus dans cette table ronde.
Plaidoyer de la Première Dame
La Première Dame a révélé à l’opinion que 1152 femmes sont violées par jour en RDC. «A l’heure où je vous parle, il est fort probable que dans un coin de notre pays, qu’une mère, une femme, une sœur et dans le plus macabre des cas, une petite fille, voire un petit garçon est violé», déclare l’épouse du Chef de l’Etat.
Pour Denise Nyakeru, il ne peut y avoir des droits sans réparation et on ne peut espérer un Congo nouveau sans réparer les torts causés à celles qui, par leur sagesse, construisent la nation et qui par leur ferveur, engendrent et éduquent.
«Chers membres du gouvernement et du pouvoir judiciaire, cette lutte ne saurait être menée sans vous ; ce combat ne saurait être gagné sans votre intervention», dit-elle, rappelant à l’occasion l’engagement pris par la RDC avec l’ONU en 2019. Le gouvernement s’est engagé à lutter contre l’impunité en traduisant les auteurs des violences en justice, de veiller à ce que les victimes et les membres de leurs familles aient un accès à la justice et à une juste réparation, d’assurer le paiement rapide des réparations établies par des décisions judicaires, d’accélérer le processus d’adoption d’une loi portant création d’un fonds de réparation au profit des victimes et d’assurer son alimentation et son fonctionnement, d’accélérer l’adoption de la loi sur l’aide juridique afin d‘assurer que les victimes des violences sexuelles liées au conflit puissent bénéficier d’une aide juridique.
«Cette table ronde inclusive nous offre une formidable opportunité de traiter en famille, des éléments pouvant permettre l’élaboration d’une loi et l’adoption d’une politique nationale de réparation. Elle constitue en outre l’occasion de proposer des solutions pratiques de mise en place d’un fonds national de réparation des violences sexuelles», fait savoir la Première Dame.
Des instants plus tôt, le ministre des Droits humains, Albert-Fabrice Puela, a affirmé que l’instauration d’une justice transitionnelle constitue l’un des piliers essentiels de la stratégie de lutte contre l’impunité pour la réparation de ces crimes. Et ce, avant de répondre à la question de savoir, d’où viendront les recettes du fonds.
Le ministre a ainsi évoqué l’article 6 du projet qui prévoit la dotation budgétaire initiale, les subventions budgétaires, les fonds collectés exceptionnellement par l’élan de solidarité nationale et internationale, 1% sur les factures de consommation d’eau et d’électricité, 1% des fonds perçus par le Fonds national d’entretien routier (FONER), 1% des royalties pétrolières, 1% des sommes prélevées sur les loteries et jeux du hasards, 1% du bonus de participation des entreprises du secteur minier et agricole et autres activités du Fonds social de la République, 1% de la redevance ad valorem prévue par la loi au profit du Fonds de promotion culturel (FPC), 1% des recettes du Fonds forestier national (FFN), 1% des recettes du Fonds de promotion de l’industrie (FPI), 15 centimes sur les transactions financières opérées par la téléphonie mobile en Rdc, 1% prélevé par les entreprises brassicoles et de réassurance, 1% des primes versées par la communauté des assureurs, des intérêts pratiqués sur les auteurs d’infractions de violence sexuelles et crimes graves, des dons, legs et libéralités.
Intervenant par visioconférence, Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix 2018, a remercié le couple présidentiel pour son implication dans la création de ce fonds. A l’occasion, il a réitéré son credo, à savoir la justice transitionnelle et les chambres spécialisées pour les violences sexuelles en temps de conflits.
A noter que des autorités nationales congolaises, des membres des organisations des survivantes des violences sexuelles, des acteurs de la société civile, des experts en réparation ainsi que des représentations diplomatiques participent à la table ronde sur la mise en œuvre du fonds national de réparations des violences sexuelles. Didier KEBONGO et Mathy MUSAU