Chiffres à l’appui. Oui, mais…

Rien de plus ambivalent que les chiffres. Ils sont têtus, imparables, opposables à tous. Bien souvent, ils résument  une situation mieux qu’une longue littérature. Que de fois n’a-t-on entendu cette phrase: « les chiffres parlent d’eux-mêmes« . En somme, le versant scientifique de l’argument d’autorité sous la Grèce antique avec l’implacable « Aristote l’a dit« .

Qui peut donc a priori trouver à redire lorsque le Premier ministre Sama Lukonde égrène, tel un chapelet, les chiffres en grande partie flatteurs pour sacrifier à la tradition initiée par Franklin Roosevelt -père du new deal américain- de 100 premiers jours. Croissance en hausse, taux de change stabilisé, inflation maîtrisée, réserves de change en augmentation. Bref, les principaux indicateurs du cadre macro-économique sont à nouveau au vert !

Reste que depuis le milieu des années 80, le concept savant voire ésotérique de « cadre macro-économique » a été invariablement -ou presque- servi à des Congolais sans que ces derniers n’en soient rassasiés.

Du haut de son grand âge, Léon Kengo wa Dondo, trois fois Premier ministre, se souvient encore de la magie de chiffres. Lui qui a « assaini » l’économie zaïroise au point de faire du pays du Maréchal Mobutu le « meilleur élève » du Fonds monétaire international !

Des chiffres à faire pâlir d’envie, Adolphe Muzito, héraut et héros du point d’achèvement de l’initiative PPTE les a étalés avec maestria tout au long de son séjour sur l’avenue Roi Baudouin. Entre deux tourmentes judiciaires et-politiques?-, Matata Ponyo peut réciter sa leçon sur le cadre macro-économique dispensé ex cathedra aux mêmes congolais durant ses quatre ans passés à la Primature. Rien donc de nouveau sous le soleil. 

Côté chiffres, les Congolais ont été mangés à toutes les sauces imaginables. Ils attendent toujours – façon Godot ?- qu’on les invite à table. Pour enfin  manger à leur faim.

Blanchi sous le harnais des « années promesse« , le Premier ministre Sama Lukonde n’ignore pas que c’est sur l’atterrissage du légendaire chinchard dans l’assiette du plus démuni -c’est-à-dire du plus grand nombre- qu’il est particulièrement attendu. Car, vu du Congolais lambda, « Etat prospère » rime avec « ventre plein« .

 Au front depuis une centaine de jours, les « warriors » auront beau remporter quantité de batailles en exhibant les chiffres. Ce serait sympathique. Mais, la guerre, elle, se gagnera à l’aune de la requalification du panier de la ménagère. « Du concret« , comme l’a reconnu le « premier des guerriers« .

José NAWEJ

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