Unikin: Des étudiants ont manifesté hier après le meurtre de leur camarade

* Une question orale avec débat est adressée au VPM de l’intérieur au sujet des « bavures policières ».

L’Université de Kinshasa était en ébullition la journée d’hier lundi 26 juillet. Des étudiants ont manifesté contre le meurtre de leur camarade, Honoré Shama Kwete, tué par balle par un policier, le samedi 24 juillet dernier, dans la commune de Selembao, alors qu’il faisait un travail pratique avec ses collègues.

Étudiant en deuxième année de graduat en Sciences de l’information et de la communication à l’Université de Kinshasa, Honoré Shama Kwete a été abattu alors qu’il réalisait un travail pratique du cours de l’initiation au Cinéma, dans la commune de Selembao. Selon les témoins, le policier lui a tiré dessus après une interpellation pour n’avoir pas porté le masque, enfreignant ainsi l’une des mesures prises par les autorités politiques pour lutter contre la troisième vague de Covid-19. On rapporte que l’homme en uniforme a ouvert le feu après échanges de parole qui a conduit à des bousculades entre les deux.

Selon un communiqué du commandant de la Police de la ville de Kinshasa, ce tir à coup de feu est intervenu après que les éléments de la Police ont exigé du groupe d’étudiants le document légal autorisant le tournage. «Ne l’ayant pas, l’assistant ou l’enseignant qui encadrait les étudiants a été emmené par les policiers. Les étudiants qui exigeaient la libération de leur encadreur se sont mis à lancer des projectiles sur les policiers. C’est alors qu’en voulant tirer une balle de sommation par terre, par imprudence, l’étudiant Honoré Shama Kwete sera atteint au ventre et mourra sur place», a écrit le général Sylvano Kasongo.

Pour des étudiants de l’Unikin, les circonstances ayant conduit à la mort de ce jeune homme de moins de 25 ans importent peu. Ils pensent qu’il est inacceptable qu’un policier tire à bout portant sur un étudiant. Enragés, ils ont paralysé les activités toute la journée d’ hier au sein de leur établissement et dans les quartiers environnants.

Dès les premières heures de la matinée, les étudiants ont commencé à manifester sur le site de l’Unikin contre le meurtre de leur camarade. Constitués en différents groupes, ils ont commencé à circuler les auditoires, branches d’arbres à la main, question d’appeler leurs camarades à se joindre à eux pour manifester. «Nous ne pouvons pas laisser ce fait passer sous silence», répétaient-ils dans les chants.

Il a fallu attendre près d’une heure  pour que toutes les activités soient paralysées sur ce campus universitaire. Des étudiants ont brûlé les pneus empêchant les véhicules d’accéder au site universitaire et à ceux qui étaient à l’intérieur de sortir. La goutte d’eau qui a failli faire déborder le vase a été le moment où des étudiants ont vu les policiers venus rétablir l’ordre public au campus.

DES ÉCHAUFFOURÉES

Il s’en est suivi des échauffourées. Il y a eu pendant plusieurs heures échange des jets de pierres contre les gaz lacrymogènes de la Police qui voulait à tout prix dégager les artères bloquées par les manifestants et empêcher les étudiants de descendre dans la cité.

Pour le colonel Eddy Mukuna, qui est vite arrivé sur place pour calmer les esprits, l’enjeu consistait à empêcher les étudiants d’atteindre la cité. Un pari qu’il a réussi à éviter ainsi que les manifestants qui étaient certainement infiltrés par les badauds ne puissent atteindre les quartiers environnants avec tous les risques que cela représentait pour la sécurité des personnes et de leurs biens.

Aucune mort d’homme n’a été enregistrée au terme de ces affrontements. Des étudiants interpelés ont été relâchés. On note cependant plusieurs dégâts matériels à la suite de ces événements. Des étudiants ont mis le feu à l’amphithéâtre derrière le bâtiment administratif de cet alma mater et caillassé des véhicules de paisibles citoyens.

UNE QUESTION ORALE AVEC DÉBAT

La mort de cet étudiant  a, dès lors, plongé tout le monde dans l’indignation et soulevé le problème du recrutement et de la formation des policiers. Consterné, le député national Ados Ndombasi a déposé la même journée d’hier, au bureau de l’Assemblée nationale, une question orale avec débat adressée au vice-premier ministre de l’intérieur Daniel Aselo Okito.

«Les bavures policières à répétition en RDC inquiètent. Aujourd’hui quand vous croisez un policier, vous vous sentez en insécurité. Ici, à Kinshasa, la police est synonyme de tracasseries et d’actes criminels», a-t-il dénoncé.

Quelle est la politique de recrutement des policiers moyens en RDC ? Quels sont les critères du recrutement des policiers ? Pourquoi les policiers congolais doivent circuler avec des armes de guerre en pleine capitale ? Ce sont là un échantillon des questions auxquelles le patron de la territoriale devra répondre.

DÉMILITARISATION DES POLICIERS

Interrogés au sujet de ces bavures policières, des experts es sécurité en appellent à la démilitarisation des policiers. Coordonnateur national du réseau pour la réforme du secteur de la justice, Emmanuel Kangele Kalonji recommande la rigueur dans le recrutement. Il pense qu’il faut mettre à la disposition des policiers des armes dissuasives plutôt que létales.

Entre temps, le policier qui a donné la mort à ce jeune étudiant en SIC est jusque-là introuvable. Des voix s’élèvent pour diligenter une  enquête afin de le retrouver, lui et ses collègues. Pas plus tard que le 10 juillet dernier, un autre policier à la gâchette facile a tiré sur un jeune dans la commune de Makala. 

Orly-Darel NGIAMBUKULU

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