Faut-il saluer le réchauffement des relations bilatérales entre Kinshasa et Kigali ? Faut-il applaudir de deux mains la signature des accords de coopération entre la RDC et le Rwanda ? Comment ne pas répondre par l’affirmative aux questions qui, par leur nature, charrient tout ce qu’il y a de noble, de civilisé, d’humain dans les rapports entre Etats. Qui plus est, entre deux pays voisins condamnés par la géographie à demeurer côte-côté ad vitam aeternam.
La séquence très malheureuse de l’éruption du volcan Nyiragongo administre la preuve par l’absurde que Congolais et Rwandais sont unis par… le sort. Du reste, les populations frontalières ont toujours commercé quelle que soit la période. C’est fort de cette constante géopolitique que Napoléon 1er lança cette formule : « Tout Etat fait la politique de sa géographie ».
A moins de prendre des libertés avec l’implacable « principe de réalité« , impossible donc d’imaginer le Congo et le Rwanda officiels se regarder continuellement en chiens de faïence. A moins de refuser à ses risques et périls de prendre le train de grands ensembles qui préfigurent la ZLECAF -Zone de libre- échange continental africain -, difficile de ne pas jouer la carte de l’insertion dans son environnement sous régional.
Une fois que l’on a décliné ces bonnes raisons d’avoir des relations normales avec le Rwanda, s’imposent aux Congolais de vieux comptes non soldés. Kinshasa pouvait les faire passer par pertes et profits au nom de l’entente cordiale s’ils étaient résiduels. Or, précisément, le fond du contentieux RDC-Rwanda est plutôt existentiel.
Le différend ne renvoie pas aux simples bisbilles entre voisins. Le conflit n’a pas pour origine le vol de poules, de chèvres ou même de vaches au niveau des frontières.
Sans être le seul agresseur de la RDC, le Rwanda n’est pas étranger à la lourde facture rouge faite de sang des Congolais. Le négationnisme articulé encore tout récemment par le Président rwandais et répété dans toutes les langues par son ambassadeur à Kinshasa ne facilite pas l’établissement d’un partenariat reposant sur des bases saines. En clair, dans ce cas de figure seuls les rapports de force déterminent le futur. Les salamalecs et autres postures « ami, ami » sont comme des cerises sur un gâteau qui n’existe pas encore.
Suite au précédent, qu’est ce qui garantit que Kigali qui n’a pas battu sa coulpe ne reprendra pas son aventure au motif de poursuivre les « forces génocidaires » ou de voler au secours de certaines catégories de Congolais ? Or, le flou continue à persister sur ces deux casus belli apparents sans parler de ce non-dit récurrent que sont des prétentions territoriales que l’on entend d’officiels rwandais dans la foulée de chaque agression-rébellion. Même si « l’allié-coach-parrain, c’est selon » étatsunien n’a plus de raison d’employer les mêmes méthodes que dans un passé récent. Sous Félix-Antoine Tshisekedi, Kinshasa s’est en effet mis sous le régime du « partenariat stratégique pour la paix et la prospérité« .
N’empêche, la démarche actuelle a, par son côté bisounours voire conte de fées, de quoi séduire les adeptes des palliatifs à court terme. Elle équivaudrait en réalité à cautériser une plaie profonde et non à la soigner…en profondeur. Pas besoin d’être toubib pour prédire la suite.
José NAWEJ