CENI : réformer sans réformer

Devinette. Quel est l’alibi, le bouc-émissaire,  le souffre-douleur, le cache-sexe de l’incurie de la classe politique rd congolaise de ces quinze dernières années ? Réponse: la CEI muée – sans réforme -en CENI.

Des élections de 2006 à celles de 2018 en passant par celles de 2011, tous les vaincus n’ont qu’une seule chanson: c’est la faute à la CENI.

Un prétendant à la présidentielle star à Kinshasa mais illustre inconnu dans le pays réel s’en sort avec un score confidentiel ? Le responsable de la bérézina a pour nom : CENI. Un candidat aux législatives retourne dans son bled juste le temps des scrutins et peine à exister dans les urnes ? C’est encore et toujours la centrale électorale qui est pointée du doigt. Idem pour tous les représentants des « partis-mallettes » plus présents sur les plateaux-télé à Kinshasa que sur le terrain.

Un peu à la manière d’un étudiant qui, en cas de réussite, clame tout haut qu’il a obtenu autant de points. En revanche, en cas d’échec, le discours est tout trouvé : le prof m’a collé X point sur vingt.

Pour autant, pour véridiques qu’elles soient, les turpitudes des candidats malheureux aux élections sont loin, très loin même de résumer le mal électoral qui ronge la RDC.  Ces aventures et mésaventures constituent même des épiphénomènes face au phénomène structurel qu’est la CENI. En l’occurrence, le ver est dans le fruit.

Comment rêver d’une CENI indépendante aussi longtemps que ses animateurs proviennent, pour l’essentiel, de la classe politique ? Bien qu’estampillé « Société civile« , le Président a besoin du quitus du chef de l’Etat, lui-même candidat à sa réélection, pour entrer en fonction. Là, naissent les relations dangereuses pour ne pas dire « incestueuses« .

Ce n’est pas tout. La famille politique au pouvoir se taille la part du lion dans les postes du staff dirigeant. Suivie de l’opposition parlementaire qui, pour le coup, joue le rôle de variable d’ajustement.

Cornaquée par les politiques, la société civile émasculée sert de caution à un jeu électoral qui fait du clan présidentiel l’ultra favori de la compétition. Pour couronner le tout, lorsque la CENI passe la balle à la Cour constitutionnelle, la messe est déjà dite… avant d’avoir été dite. La boucle est ainsi bouclée. Ce modus operandi est connu de tous les observateurs de la scène politique congolaise.

C’est justement ce que tous les opposants d’hier en ce compris l’UDPS entendaient changer via des réformes de la CENI, de la loi électorale et même de la Haute cour. La proposition de loi Lutundula, celle du G14 et les « réformes Lamuka« , autant de projets de thérapie à « l’anomalie » électorale dont souffre le pays.

Cette maladie risque de perdurer. Car, la proposition de loi dans le pipeline parlementaire ne rime plus avec réformes. A peine quelques « réformettes » à la marge. Puisque la CENI gardera la même figure. Celle d’un machin contrôlé par la majorité au pouvoir.

Sauf que le pouvoir d’aujourd’hui est composé pour partie de l’opposition d’hier. Adorer comme pouvoir ce qu’on a décrié  comme opposants et brûler aujourd’hui ce qu’on a adoré hier. Voilà ce à quoi semble se réduire la nouvelle majorité.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, pas besoin d’être devin ni prestidigitateur pour prédire la suite. A moins que l’autre volcan (politico-social celui-là) n’entre en éruption. Gare aux laves !  

José NAWEJ

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