Vivement des mesures d’encadrement pour sécuriser les étudiants !

* D’ores et déjà, des observateurs redoutent l’effet domino plus néfaste.

Finis la vente et l’achat obligatoire de syllabus des cours dans tous les établissements de l’Enseignement supérieur et universitaire (ESU) en RD Congo. Ainsi, en a décidé le ministre du secteur, Muhindo Nzangi Joseph, cité hier par Top Congo Fm, radio privée émettant de Kinshasa.

Secret de polichinelle, la pratique de vente de syllabus a encouragé la paresse aussi bien des enseignants que des étudiants. Généralement, les profs qui s’adonnent à la commercialisation des supports de leurs enseignements, survolent la matière et renvoient les étudiants au syllabus.  » Je donne les grandes lignes du cours et vous trouverez les détails dans le support. La seule participation au cours ne suffit pas pour réussir. L’achat du syllabus est obligatoire« , entend-on souvent dire des profs commerçants de leurs enseignements, dès leur première rencontre de prise de contact avec les étudiants.

Qui pis est, il y en a qui, au nom du syllabus, brillent par leur négligence et absentéisme chronique. Toute l’année, Ils ne se présentent que deux ou trois fois devant les étudiants. La première, lors de la présentation du plan du cours. Et la dernière fois, c’est quand il doit soumettre les étudiants à un test d’évaluation. Entretemps, le prof, sous prétexte de ses extramuros (Conseiller dans un cabinet politique, consultant dans une Ong internationale), abandonne à son assistant, toute la charge horaire.

Pourtant, l’article 30 de l’Ordonnance 81-160 du 7 octobre 1981 portant statut du personnel de l’Enseignement supérieur et universitaire stipule clairement que  »  les Professeurs consacrent toute leur activité à l’université ou à l’institut supérieur où ils assument une charge pleine d’enseignement, exercices pratiques ou cliniques compris par année académique, et à la recherche scientifique« .

Par ailleurs, la même ordonnance, à son article 37, précise que « les assistants et les Chefs de travaux assistent le professeur dans le travail scientifique, les exercices et les travaux pratiques. Ils remplissent exclusivement  leurs fonctions à l’Université ou à l’Institut supérieur« .

A la lumière de ces dispositions légales, il est donc clair qu’un assistant ne peut enseigner. Il est aussi, d’autant plus clair que le Prof reste le seul maitre et responsable de sa charge horaire annuelle. Hélas, la réalité dans la plupart des universités et Instituts supérieurs en RD Congo,  sont celles où les assistants, parfois de premier mandat, se tiennent devant les étudiants, malgré toutes leurs insuffisances pédagogiques intellectuelles évidentes.

CONDITION A LA PARTICIPATION AU TEST D’EVALUATION

Toujours en ce qui concerne les enseignants, y en a qui vont jusqu’à conditionner la participation à une interro, un Travail pratique ou à un Examen, par l’achat du syllabus. Autrement dit, seuls sont admis à ces différents tests d’évaluation, les étudiants en ordre d’achat de notes polycopiées. Ici encore, le « tout-puissant » assistant joue le rôle d’incontournable entremetteur entre le prof et les étudiants. A défaut, l responsabilité est confiée au chef de promotion (généralement des étudiants moyens). Celui-ci vend le support et rend le compte au Prof !

Dans ces conditions, la plupart des étudiants perdent d’office, la motivation et même l’intérêt d’assister régulièrement aux cours, préférant carrément acheter les notes polycopiées. Moralité, ils perdent les aptitudes, le bon réflexe de savoir prendre note, requis à tout étudiant. Dès lors que nombre de finalistes mal formés des humanités, sont admis dans les universités et les Instituts supérieurs comme dans une église, c’est-à-dire sans filtre ou concours rigoureux d’admission,  la plupart des profs trouvent ainsi, un bon prétexte pour vendre leurs syllabus.

Bien pire, dans la majorité des universités et instituts supérieurs du pays, notamment à Kinshasa, la vente et l’achat obligatoire du syllabus ont fini par encourager l’école buissonnière. Nombre d’étudiants ne se présentent dans leurs auditoires que le jour d’interro ou d’examen. Rien de scoop ! Il s’agit plutôt, d’une réalité bien connue des comités de gestion de nos établissements d’enseignement supérieur et universitaire.

VIVEMENT DES MESURES D’ENCADREMENT

Ici comme ailleurs, les études universitaires ont pour vocation de stimuler, de développer l’esprit de la recherche chez l’étudiant. D’où, le devoir pour ce dernier d’être une véritable souris de bibliothèques. Comme qui dirait, les seules notes de cours ne suffisent pas. Comme pour dire aussi qu’avec cette méthode livresque d’enseignement, le Prof se dit n’avoir pas tout le temps matériel nécessaire pour livrer le contenu de ses enseignements dans tous les détails. D’où, le syllabus. Mais tout le problème, est le caractère obligatoire de l’achat de ces notes imprimées.

S’il existe des Profs qui mettent à la disposition des étudiants, un exemplaire de son syllabus et laisse à ces derniers, la latitude de polycopier, y en a qui exigent carrément l’achat, avec des conséquences que cela entraine sur le rendement et l’appréciation même de l’étudiant !

Pour toutes ces raisons, la mesure prise par le ministre Muhindo Nzangi, d’interdire la commercialisation du syllabus, sonne comme une véritable bouffée d’oxygène apportée à des milliers d’ « étudiants « désoxygénés », étouffés à souhait par des profs commerçants !   

Cependant, si cette décision est bien accueillie, aussi bien dans les milieux de nombreux parents que d’étudiants, elle alimente toutefois, des craintes de nombre d’observateurs qui redoutent l’effet domino plus néfaste.

Certains partenaires et experts du secteur de l’ESU considèrent cette mesure comme une sorte de placebo impur. D’autres la jugent comme ce fameux remède qui pourrait s’avérer plus nocif que la maladie qu’il est supposé guérir.

Tout en  soutenant cette décision  du ministre, d’autres observateurs estiment, néanmoins, que le patron de l’ESU  aurait fait œuvre utile, en commençant par faire un état des lieux sans complaisance de la situation dans son secteur.

De l’avis des analystes, l’ESU en RD Congo figure parmi les domaines de la vie nationale qui nécessitent des réformes urgentes et rigoureuses pour relever le défi de la qualité de l’enseignement. Tant mieux, si la décision du ministre ne pourra provoquer le moindre ressentiment.

Peu importe le côté de la barrière où l’on se trouve, l’interdiction de la commercialisation des supports de cours dans les établissements de l’ESU, a le mérite d’alléger, si peu que ce soit, le fardeau des milliers d’étudiants issus des familles sans ressources. Mais…La suspension vaut son pesant d’or, quand on connait les réalités dans nos Instituts supérieurs et Universités.

Lorsque des observateurs redoutent l’effet boomerang de cette mesure, ils pensent ici, aux enseignants qui ont systématisé la vente et l’achat obligatoires des supports de leurs cours. La crainte est que si ces Profs (malintentionnés ?) considèrent la mesure du ministre, comme une manière pour ce dernier de leur couper l’herbe sous le pied, alors il y a risque qu’ils attendent les étudiants au tournant.

La mesure étant prise, tant qu’à faire qu’elle ne puisse produire des effets « funestes » sur les étudiants. Alors, vivement des mesures d’encadrement, pour mettre les étudiants à l’abri de la loi du talion.  Grevisse KABREL

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