*Si l’on en croit les observateurs, cette institution serait comme un instrument de neutralisation utilisée subtilement au bénéfice de la consolidation du pouvoir du Président de la République, candidat à sa succession en 2023…
La nécessaire lutte contre l’impunité ne devrait tourner ni à une espèce de chasse aux sorcières ni à un règlement de comptes politiques ni devenir une arme de disqualification massive dans la perspective de la présidentielle de 2023. Or de plus en plus d’indices semblent de nature à créditer cette thèse sus-évoquée. Tout se passe comme si seuls les politiciens d’une certaine tendance ou d’une certaine carrure seraient des clients tout désignés de ce qui ressemble à une opération » mains propres » version tropicale.
Ainsi, certains observateurs sont enclins à considérer que l’affaire Matata rentre dans ce cas de figure. Ils en veulent pour preuve- ce qu’ils considèrent comme de l’acharnement de l’IGF (Inspection générale des finances) contre l’ancien Premier ministre dans le dossier du parc agroindustriel de Bukanga Lonzo.
» À cet effet, plus n’est besoin d’énumérer ici la propension de l’IGF à s’acharner sur quelques figures de proue du régime Kabila, sans pour autant s’intéresser aux cas flagrants et nombreux de mauvaise gouvernance et corruption au sein de la présidence ou dans le camp pro-Tshisekedi, dont le plus récent est le soupçon de rétro-commission dont auraient bénéficié la ministre honoraire de l’économie Acacia Bandubola et l’actuel ministre du Numérique Désiré Cashmir Eberande, en son temps DirCab a.i du Président de la République « , font remarquer ces observateurs.
Selon ces derniers, en parallèle, le camp présidentiel continuerait de faire pression sur au moins trois axes majeurs dans l’objectif de neutraliser les potentiels adversaires et de baliser le chemin pour leur candidat naturel. Ces trois axes sont : » Exclusion par la nationalité (via Noël Tshiani en utilisant le Parlement et la Justice); Mise en œuvre d’une justice à double-vitesse (via l’IGF et la Justice); Industrie de production de fake news et des insultes (en passant par les réseaux sociaux).« .
Le camp pro-Tshisekdi l’aurait si bien compris. A en croire les mêmes sources, » plusieurs comptes anonymes et un réseau bien identifié des journalistes et des partisans sont actifs quasiment 24h sur 24 pour amplifier ou alimenter la toile des nouvelles destinées à discréditer le camp adverse ou à vanter les exploits du président de la République.
« Pour ces observateurs, le camp pro Fatshi utiliserait « subtilement et efficacement » l’IGF comme « un instrument de neutralisation, et même de dissuasion » au bénéfice de la consolidation du pouvoir du Président de la république, qui ne cache pas sa volonté de se succéder à lui-même en 2023. Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo s’est exprimé à haute et intelligible voix au cours d’un meeting populaire à Lubumbashi, le 12 mai courant.
Devant la foule à la place Moïse Tshombe, le Chef de l’Etat a déclaré son intention à transformer le pays pour le temps qu’il lui reste de son mandat actuel. « Je vais vous présenter un programme qui prendra en compte tous les territoires du pays. Vous verrez comment nous allons changer le Congo d’ici 2023 « , a-t-il affirmé, avant de préciser : « Je vais revenir pour vous demander si vous êtes contents de ma gestion. En 2023, accordez-moi encore vos voix pour que je continue « .
Des observateurs sont formels : « L’Inspection Générale des Finances (IGF) est l’un des instruments utilisés par le camp pro-Tshisekedi pour promouvoir une meilleure gouvernance dans la gestion de la chose publique. La mission de l’IGF est donc, par essence, noble et vitale pour un pays riche en ressources naturelles et minières, mais pauvre économiquement. »
Après Matata, Katumbi ?
Aux yeux de ces observateurs, l’ancien Premier ministre risque de ne pas être le seul dans l’œil du cyclone. Moïse Katumbi pourrait faire partie aussi de ces personnalités. L’ancien gouverneur de l’ex-province du Katanga a également des ambitions présidentielles. Et cela en fait fatalement un concurrent de Fatshi…qu’il faudrait disqualifier.
Les observateurs notent qu’à la veille de la déclaration de la candidature du Président Tshisekedi à sa propre succession, Noël Tshiani a multiplié les apparitions médiatiques, couplées à la série des propos publiés sur son compte Twitter. Des tweets qui en disent long. A l’instar de celui du 3 mai : « J’ai fini les consultations avec les Présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale. Ma proposition de verrouiller l’accès à la Présidence de la RDC et à d’autres hautes fonctions de l’État sera rédigée en loi à soumettre rapidement au parlement. Je prédis: La loi sera adoptée« . Ou encore celui du 9 mai : « Ma proposition de verrouiller l’accès à la présidence touche l’âme des prédateurs de nos ressources naturelles. Vous pouvez vous en rendre compte par les attaques truffées de mensonges qu’ils sponsorisent contre moi. Et pourtant, ma proposition deviendra loi et la RDC sera sauvée« .
Noël Tshiani ne s’est pas arrêté là. Trois jours plus tard, le 12 mai, il a tweeté ceci : « Après la rencontre à l’Assemblée nationale avec quelques députés nationalistes, la rédaction de la loi pour verrouiller l’accès à la présidence et à d’autres fonctions sensibles a commencé. Le verrouillage aura bel et bien lieu et la RDC sera sauvée de l’infiltration au sommet« . L’allusion au leader de l’Ensemble pour la République semble transparaître dans ces propos de Noël Tshiani.
Question: La « Fatshisphère » serait-elle vraiment prête à franchir le Rubicon? C’est-à-dire à faire voter une loi sur la nationalité congolaise, dont le principal objectif serait d’exclure un adversaire parmi les plus redoutables, en l’occurrence Moïse Katumbi?
D’après ces sources, l’ancien gouverneur de l’ex-province du Katanga ne serait pas le seul obstacle à… « maîtriser » voire à « neutraliser ». Au nombre de « wanted« , figureraient aussi Bemba, Fayulu, Kamerhe… dont le sort a été scellé à l’issue du procès de 100 jours…
Ce pays a trop souvent souffert de l’impunité pour qu’on n’applaudisse pas le réveil de la justice et de tous les organes qui concourent à la bonne gouvernance, notamment l’IGF, la Cour de comptes. Mais les observateurs alertent sur le risque d’une instrumentalisation à des fins politiques de l’appareil judiciaire et des services de contrôle de l’utilisation de l’argent public. C’est ce qu’on appelle la justice à la carte.
Si on n’y est pas encore, il faudrait éviter qu’on y arrive. Pays encore fragile, la RDC n’a certainement pas besoin de voir la cohésion nationale et la paix sociale se déliter à la suite des règlements de comptes politiques.
Didier KEBONGO
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