Administration militaire à l’Est : Voici les coûts politique et financier

Dans le programme d’action du gouvernement du Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde investi lundi dernier à l’Assemblée nationale, il est prévu de décréter l’état de siège dans les zones qui sont sous contrôle des groupes armés où l’administration civile sera remplacée par les militaires. Mais le chef du gouvernement n’a pas clairement défini comment cela devra se faire sur le plan pratique étant donné que cette opération de remplacement de l’administration civile classique par celle des militaires n’est pas aussi simple qu’on le pense et a du reste un coût financier et politique.

Il s’agirait donc d’une  administration spéciale qui déroge à la Constitution du 18 Février 2006. Celle-ci a octroyé une personnalité civile aux ETD  » Entités territoriales décentralisées  » différente de celle de l’Etat congolais. Ces ETD notamment les provinces, les villes, les communes et les secteurs ont une souveraineté dans  des matières qui sont bien définies comme par exemple les élections de leurs Exécutifs par leurs organes délibérants indépendamment du pouvoir central.

Ce dernier n’a de tutelle que sur les entités dites déconcentrés qui sont le Territoire et le village. Partant, on ne voit pas comment le gouvernement va mettre en congé des Institutions provinciales issues des élections. Plus explicitement commet il va fermer les Assemblées provinciales et leurs Exécutifs correspondants pour les remplacer par des administrateurs militaires nommés qui répondent non des Assemblées provinciales qui sont des organes délibérants en province mais plutôt du gouvernement central.

Une parenthèse impossible à accomplir. Au fait ce qui ne peut être réalisable que dans les entités déconcentrées comme le Territoire et le village où les dirigeants sont nommés par le gouvernement central. Ce pose la question de savoir si dans ce cas précis, les groupes armés de l’Est ne seraient actifs que dans les entités déconcentrées et non les ETD. Par ailleurs, il sied de noter qu’au cas où cette opération de remplacement des administrateurs civils par des militaires à quelque niveau que ce soit s’accomplirait, elle aurait un coût financier et politique.

Le programme présenté par le Premier ministre Sama Lukonde ne le chiffre pas. L’installation des militaro dans l’administration civile va induire des ressources du trésor public. Sur le plan politique, les administrateurs civils seront mis hors-jeu mais ils continueront toutefois à percevoir dûment leurs salaires, ce qui fait un double-empli pour le trésor public qui sonne creux et qui ne peut se permettre une double-dépense là où les Congolais sont appelés à serrer la ceinture.

En Ituri autrefois, on avait entendu la Société civile tout comme les députés nationaux du caucus à l’Assemblée nationale exigeaient au chef de l’Etat de décréter l’état de siège dans tout l’Ituri sans exception en replaçant les autorités civiles actuelles par des militaires. Sama Lukonde les a entendus et a répondu favorablement en projetant l’installation des administrateurs militaires dans l’Est de la RDC. Plus facile à dire qu’à faire.

Car lorsque l’on examine lucidement toute opération d’installation de l’administration militaire, on se rend bien compte qu’il y a des obstacles de tous ordres. Le premier  est le risque d’aller en dehors de la Constitution qui ne prévoit dans aucune de ses dispositions de placer les ETD, c’est-à-dire les provinces, les villes, les communes et les secteurs sous tutelle du Pouvoir central. Du côté du Nord-Kivu où les populations sont frappées dans presque la même proportion que l’Ituri voisin, personne ne parle de l’installation d’une administration militaire à la place de civils. Ici on entend plutôt comme revendication un peu partout que le Président de la République, Commandant suprême des FARDC vienne s’installer à Beni comme il l’avait promis lui-même de sa bouche pendant la campagne électorale. Ceux qui continuent à faire cette réclame doivent savoir que l’installation prolongée d’un chef d’Etat dans un coin du pays a un cout onéreux sur tous les plans.

KANDOLO M.

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